Barack Obama a rompu son silence mercredi sur la Libye, appelant le monde à s'unir contre une violence «scandaleuse», et donnant le coup d'envoi d'un effort diplomatique américain accru.

«La souffrance et le bain de sang sont scandaleux et inacceptables», a lancé depuis la Maison-Blanche le président des États-Unis, dont c'était la première déclaration à propos des violences en Libye depuis le début de la crise.

M. Obama a solennellement averti que le régime de Mouammar Kadhafi aurait à rendre compte de ses actes.

«Il doit être tenu responsable de son incapacité à honorer ses responsabilités, et il devra affronter les conséquences qu'entraînent les violations continues des droits de l'homme», a-t-il dit.

Il a également annoncé qu'Hillary Clinton, la chef de la diplomatie américaine, participerait lundi 28 février à une réunion au niveau ministériel du Conseil des droits de l'homme de l'ONU à Genève, l'occasion pour elle de multiplier les contacts avec ses homologues étrangers sur la Libye.

William Burns, le directeur politique de la diplomatie américaine, a été envoyé en tournée, notamment en Europe, afin de préparer ces entretiens.

«Au milieu d'une telle situation», a estimé M. Obama, «il est impératif que les nations et les peuples du monde entier s'expriment d'une seule et même voix et c'est à cela que nous travaillons».

Le président américain, qui commençait à être critiqué aux États-Unis pour sa réaction jugée trop mesurée aux événements, a également fait allusion au discours incendiaire prononcé la veille par le colonel Kadhafi.

Il a dénoncé, sans toutefois nommer le dictateur, «les menaces et les ordres de tirer sur des manifestants pacifiques, et de nouvelles punitions contre le peuple libyen».

Le dirigeant de Tripoli avait comparé mardi les manifestants à des «rats» devant être «capturés».

Plusieurs dirigeants européens, la chancelière allemande Angela Merkel en tête, avaient exprimé leur consternation à la suite de ces propos, tandis que les responsables américains refusaient de commenter le discours.

Comme Mme Clinton avant lui, Barack Obama a enfin souligné que la sécurité des Américains présents en Libye -environ 650 citoyens, ainsi qu'une cinquantaine de diplomates et membres de leurs familles - était la «première priorité» de l'administration.

Après deux jours d'attente, un certain nombre d'Américains ont embarqué mercredi sur un ferry affrété par le département d'État. Le navire, qui devait appareiller pour Malte, a été retenu provisoirement à Tripoli par la tempête.

Dans une montée en puissance progressive de la réaction américaine, le porte-parole du département, Philip Crowley, a également reconnu pour la première fois mercredi que «toute une gamme d'outils» était disponible dans le dossier libyen, y compris des «sanctions».

La prudence de l'administration avait été épinglée par plusieurs commentateurs dans la presse, ainsi que par l'ex-candidate à la vice-présidence Sarah Palin, égérie de la droite du parti républicain.

«Les États-Unis ne peuvent pas faire grand-chose pour changer la situation» en Libye, a pourtant affirmé à l'AFP Marina Ottaway, de la fondation Carnegie. L'imposition d'une zone d'exclusion aérienne, qui empêcherait l'aviation de Kadhafi de bombarder sa propre population, figure parmi les pistes évoquées à Washington. Mais même les promoteurs de cette idée reconnaissent que convaincre le Conseil de sécurité de l'ONU, puis l'OTAN, prendrait du temps.

Quant à des sanctions, Marina Ottaway juge que leur effet ne peut se faire sentir qu'à long terme: «Dans un cas comme celui-ci, qui va sans doute trouver une issue dans les quinze jours à venir, les sanctions ne changeraient rien».