La Russie a posé son veto à un projet de résolution du Conseil de sécurité sur l'attaque chimique présumée en Syrie imputée au régime de Bachar al-Assad, bloquant pour la huitième fois toute action de l'ONU contre son allié syrien.

Cette résolution proposée par les États-Unis, la France et le Royaume-Uni visait à répondre à l'attaque présumée avec des agents neurotoxiques dans la localité syrienne de Khan Cheikhoun le 4 avril, qui a fait 87 morts dont 31 enfants.

Parmi les quinze membres du Conseil, la Bolivie a également voté contre cette résolution, dix ont voté pour et trois se sont abstenus (Chine, Kazakhstan, Éthiopie).

La Russie a mis son veto au moment où le chef de la diplomatie américaine Rex Tillerson faisait état lors d'une visite à Moscou «d'un niveau de confiance bas» entre les États-Unis et la Russie.

«Avec ce veto, la Russie dit Non au fait de rendre des comptes, Non à la coopération avec une enquête indépendante de l'ONU», a accusé l'ambassadrice américaine, Nikki Haley, à l'issue du vote.

«À Assad et au gouvernement syrien (...) le temps de votre arrogance et de votre mépris pour l'humanité est terminé (...) Je suggère que vous regardiez ce vote très attentivement et teniez compte de cet avertissement», a-t-elle ajouté.

L'ambassadeur adjoint de la Russie à l'ONU, Vladimir Safronkov, a déclaré devant le Conseil que ce texte était «condamné» dès le début.

«Le résultat était pré-déterminé parce que nous avons constamment exprimé notre désaccord catégorique avec le contenu de ce document», a-t-il dit.

La résolution devait apporter le soutien du Conseil de sécurité aux enquêteurs de l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (OIAC).

Le texte exigeait notamment que les autorités syriennes fournissent les détails des activités militaires de l'armée syrienne le jour de l'attaque ainsi que les noms des commandants des escadrons aériens, et donnent aux enquêteurs un accès aux bases aériennes.

La Russie «du mauvais côté»

Selon l'ambassadeur Safronkov, la Russie avait proposé aux États-Unis d'envoyer une requête commune à l'OIAC pour une mission d'évaluation à Khan Cheikhoun et sur la base aérienne d'Al-Chaayrate, dans la province centrale de Homs, d'où les États-Unis assurent que l'attaque a été lancée.

La France et le Royaume-Uni ont exprimé leur consternation face au veto de la Russie.

Le président français François Hollande a déclaré que la Russie avait pris «une lourde responsabilité» en opposant son veto et il a accusé Moscou de protéger «systématiquement son «allié Assad».

«Cela met la Russie du mauvais côté de cette discussion», a déclaré le ministre britannique des Affaires étrangères, Boris Johnson, dans un communiqué depuis Londres.

Les enquêteurs des Nations Unies sont déjà mandatés par des résolutions antérieures pour enquêter sur l'utilisation d'armes chimiques en Syrie, mais Paris, Londres et Washington voulaient insister sur la nécessité d'une recherche approfondie sur l'attaque de Khan Cheikhoun.

La Syrie est dans l'obligation de coopérer avec l'OIAC en tant que membre de la Convention sur les armes chimiques, qu'elle a signé en 2013, mais l'accès aux sites militaires demeure un problème.

Le chef de la diplomatie russe, Sergueï Lavrov, a déclaré à la suite de ses entretiens avec Rex Tillerson à Moscou que l'OIAC doit être autorisée à mener ses travaux de manière impartiale.

«Nous insistons sur une enquête objective sur ce qui s'est passé le 4 avril», a-t-il dit.

La Russie a présenté son propre texte de résolution condamnant la frappe militaire américaine en Syrie et demandant une enquête de l'OIAC.

La possibilité d'une mise au vote de ce projet de résolution était incertaine.

L'ambassadeur britannique à l'ONU, Matthew Rycroft, a déclaré mercredi au Conseil de sécurité que les tests effectués par des scientifiques britanniques sur des échantillons provenant du site de Khan Cheikhoun ont montré que le sarin ou une substance semblable au sarin, un puissant neurotoxique, a été utilisé.

REUTERS

L'ambassadrice américaine à l'ONU, Nikki Haley.