L'ONU s'est dite très préoccupée vendredi par le sort de dizaines de milliers d'habitants bloqués dans Alep-Est, dont certains seraient empêchés de fuir par les rebelles et d'autres auraient disparu après avoir rejoint les zones contrôlées par le gouvernement.

« Nous sommes sérieusement préoccupés par la sécurité des civils à Alep, ceux qui sont encore dans les zones contrôlées par l'opposition comme ceux qui ont fui vers les zones contrôlées par le gouvernement », a déclaré lors d'une conférence de presse à Genève le porte-parole du Haut-Commissariat de l'ONU aux droits de l'homme, Rupert Colville.

L'ONU estime à « environ 100 000 » le nombre de civils se trouvant dans les quartiers d'Alep-Est qui sont encore contrôlés par les rebelles.

Mais le porte-parole a fait état d'informations indiquant que certains groupes armés de l'opposition empêchent des habitants de s'enfuir, n'hésitant pas parfois à faire usage de leurs armes.

« Certains civils qui tentent de s'enfuir sont apparemment bloqués par des groupes armés de l'opposition (...) notamment le front Fateh al-Cham », ex-Front al-Nosra (Al-Qaïda en Syrie), a-t-il dit.

« Au cours des deux dernières semaines, le front Fatah al-Cham et les Kataëb Abou Amara ont apparemment enlevé et tué un nombre inconnu de civils qui avaient demandé aux groupes armés de quitter leur quartier afin d'épargner la vie de la population », a-t-il ajouté.

« Les civils sont utilisés comme des pions », a accusé le porte-parole en laissant entendre qu'il pourrait s'agir d'un « crime de guerre ».

M. Colville s'est également dit inquiet au sujet d'éventuelles « représailles » contre des civils soupçonnés d'avoir soutenu l'opposition.

« Bien qu'il soit difficile de vérifier les faits dans une situation changeante et dangereuse, nous avons entendu des allégations très inquiétantes selon lesquelles des centaines d'hommes auraient disparu après être passés dans les zones contrôlées par le gouvernement » à Alep, a-t-il dit.

Selon certaines informations, les hommes seraient séparés des femmes et des enfants, a poursuivi le porte-parole. « Des familles ont déclaré avoir perdu tout contact avec des hommes, âgés de 30 à 50 ans, après qu'ils eurent fui les zones contrôlées par l'opposition à Alep il y a une semaine ou dix jours ».

M. Colville a ajouté qu'il y avait environ 150 « militants » dans les quartiers rebelles d'Alep qui « craignent d'être arrêtés par les forces gouvernementales s'ils tentent de fuir ».

Les Casques blancs, ces secouristes opérant dans les secteurs rebelles, ont lancé un appel désespéré aux organisations internationales pour qu'ils leur assurent un passage sûr. « Si nos volontaires ne sont pas évacués, ils risquent la torture ou l'exécution dans les centres de détention du régime ».

Malgré la suspension de ses raids aériens dévastateurs, l'armée fidèle au régime syrien continuait vendredi de bombarder à l'artillerie lourde les derniers quartiers aux mains des rebelles.

La Russie, alliée de Damas, a martelé que l'offensive syrienne ne cesserait à Alep qu'après le départ de tous les groupes armés.

Selon Moscou, des discussions « techniques » entre experts russes et américains pourraient se tenir samedi à Genève pour trouver une solution au départ des groupes rebelles d'Alep, seule condition à l'arrêt des combats pour le régime et son allié russe.

La chute de la deuxième ville de Syrie, principal bastion de l'opposition syrienne, semble de plus en plus inéluctable. Elle constituerait un tournant dans cette guerre qui a fait depuis mars 2011 plus de 300 000 morts et poussé à l'exode plus de la moitié de la population syrienne.