Les grandes puissances se sont entendues samedi à Vienne sur un calendrier de transition politique en Syrie, qui achoppe encore sur le sort de Bachar al-Assad, un coup d'accélérateur déterminé par les attaques terroristes qui ont frappé Paris.

Rencontre d'ici le 1er janvier entre représentants de l'opposition syrienne et du régime de Damas, formation d'un gouvernement de transition dans les six mois, organisation d'élections d'ici 18 mois: jamais les efforts diplomatiques pour sortir du conflit syrien n'avaient débouché sur une feuille de route aussi précise.

« La réunion a été entièrement placée sous le signe » des attentats sanglants qui ont frappé la France vendredi soir, a expliqué le ministre allemand des Affaires étrangères Franz-Walter Steinmeier. Ces événements ont « accru la détermination à aller de l'avant », durant ce deuxième round de négociations en quinze jours, a-t-il estimé.

La série d'attentats à Paris et en banlieue a fait au moins 129 morts et 350 blessés et provoqué une onde de choc mondiale.

Depuis 2011, la guerre en Syrie a fait au moins 250 000 morts et des millions de réfugiés.

Avant le début des discussions, qui ont duré environ six heures, les représentants des 17 pays et trois organisations internationales, réunis autour des chefs des diplomaties américaine et russe, avaient appelé à surmonter leurs divergences pour renforcer la lutte contre le terrorisme.

Le communiqué commun publié à l'issue de la rencontre met entre parenthèses les sujets de tension pour insister sur les points d'accord.

Le Groupe international de soutien à la Syrie, regroupant tous ces participants, « est tombé d'accord sur la nécessité de réunir le gouvernement syrien et des représentants de l'opposition pour des négociations formelles, sous les auspices de l'ONU, dès que possible, avec l'objectif du 1er janvier » prochain.

« Utopique »? 

Les grandes puissances, dont les États-Unis, la Russie, l'Union européenne, les pays arabes et l'Iran, « ont affirmé leur soutien à un cessez-le-feu et à un processus mené par les Syriens, qui d'ici six mois [...] établira un calendrier pour rédiger une nouvelle Constitution », a poursuivi le groupe. « Des élections libres et équitables auraient lieu conformément à cette nouvelle Constitution d'ici 18 mois ».

« Ça a encore l'air utopique, mais nous avons toutes les puissances autour de la table », a relevé M. Steinmeier.

Pour autant l'Iran et la Russie, derniers soutiens du régime syrien, s'opposent aux États-Unis et leurs alliés arabes et européens sur l'avenir du président Assad et sa place dans une éventuelle transition politique en Syrie.

« Nous avons toujours des divergences concernant ce qu'il doit advenir de Bachar al-Assad », a indiqué le Secrétaire d'État américain John Kerry lors d'une conférence de presse aux côtés de son homologue russe Sergueï Lavrov et du représentant de l'ONU pour la Syrie Staffan de Mistura.

« Nous avons confirmé que le futur de la Syrie sera décidé exclusivement par le peuple syrien », a prévenu M. Lavrov, dont le pays mène des frappes en Syrie depuis le 30 septembre en soutien au régime de Damas. « Cela concerne bien entendu également le sort du président Assad et celui des autres politiques de ce pays », a-t-il ajouté.

Ni le régime syrien ni ses opposants ne sont pour l'instant présent à Vienne.

La Russie comme l'Iran s'opposent aussi aux États-Unis et à leurs alliés sur les groupes syriens devant être qualifiés de « terroristes » et ceux pouvant être considérés comme appartenant à l'opposition. La Jordanie sera chargée de « coordonner une liste commune de groupes terroristes » sus l'égide du Conseil de sécurité de l'ONU, à partir des propositions des différents participants, a expliqué M. Lavrov.

Le consensus était en revanche total sur la nécessité de « coordonner la lutte internationale contre le terrorisme », selon les mots du ministre français des Affaires étrangères Laurent Fabius.

Les attentats de Paris « justifient » d'intensifier la lutte contre des organisations radicales armées telles que le groupe État islamique (EI) ou le Front al-Nosra, branche d'Al-Qaïda en Syrie, a souligné Sergueï Lavrov.

Le succès des efforts diplomatiques sera aussi étroitement lié à l'évolution du rapport de force sur le terrain, où les États-Unis pilotent depuis plus d'un an une coalition internationale contre l'EI en Syrie et en Irak voisin tandis que Moscou mène aussi des frappes accusées de soutenir le régime syrien.

Cité par l'agence officielle syrienne Sana, Bachar al-Assad a lié les attentats en France à la situation en Syrie: la politique française au Moyen-Orient a contribué à « l'expansion du terrorisme », selon lui.