L'ONU a jugé «inacceptables» dimanche les nouveaux raids du régime syrien, qui a largué des barils d'explosifs de manière aveugle ce week-end tuant des dizaines de civils dans le nord du pays.

Dans le centre du pays, le groupe ultra-radical État islamique (EI) a progressé vers l'ouest et le sud ce week-end à partir de la ville antique de Palmyre, prise au régime il y a dix jours.

Le médiateur de l'ONU pour la Syrie, Staffan de Mistura, a protesté avec force après les raids de l'armée du régime de Bachar al-Assad qui ont tué samedi 84 civils, dont des enfants, dans des zones rebelles d'Alep, la métropole du nord de la Syrie, selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH).

Au total, 141 civils ont été tués samedi dans les différents raids conduits par le régime dans plusieurs régions, a précisé l'ONG, qui s'appuie sur un réseau de sources en Syrie.

«Le bombardement aérien (...) à Alep mérite la plus forte condamnation internationale», a dénoncé M. de Mistura. «Il est totalement (...) inacceptable que les forces aériennes syriennes attaquent leur propre territoire sans discernement, tuant ses propres citoyens», a-t-il ajouté.

«Vengeance contre les civils»

Les barils remplis d'explosifs ont été largués par des hélicoptères au-dessus d'un marché populaire à Al-Bab, ville sous contrôle de l'EI, et du quartier rebelle Al-Chaar dans l'est de la métropole d'Alep, selon l'OSDH qui a évoqué un «massacre».

L'armée de l'air a également frappé Jabal al-Zawiya, région montagneuse de la province d'Idleb (nord-ouest), tuant au moins 20 civils.

«Le régime a toujours lâché des barils d'explosifs dans cette guerre, mais il intensifie ses frappes en croyant pouvoir compenser ses pertes sur le terrain», explique à l'AFP Rami Abdel Rahmane, le directeur de l'OSDH. «Il s'agit aussi d'une certaine vengeance contre les civils qui soutiennent la rébellion».

D'après lui, cette technique n'a plus le même effet sur les rebelles, car ceux-là, «forts d'un nouveau soutien de leurs parrains (Arabie saoudite, Turquie, Qatar), arrivent à tenir plus longtemps».

Les ONG internationales dénoncent régulièrement l'utilisation des barils d'explosifs par le régime.

Le chef de la diplomatie britannique Philip Hammond a également critiqué samedi «les méthodes horribles et sans discernement utilisées par le régime d'Assad pour tuer et blesser des civils innocents», appelant à «une transition politique pour un avenir dont Assad ne fera pas partie».

Les négociations sont dans l'impasse plus de quatre ans après le début du soulèvement pacifique qui s'est militarisé face à la répression jusqu'à devenir une guerre civile complexe, ayant fait plus de 220 000 morts.

Pour tenter de les relancer, le médiateur de l'ONU a entamé le 5 mai à Genève une série de discussions à huis clos et séparées avec les protagonistes du conflit et des acteurs internationaux, dont l'Iran, allié clé de Damas.

L'Irak «hors du conflit» Ryad-Téhéran

Dans la région de Palmyre, les jihadistes de l'EI ont progressé ce week-end en prenant notamment la localité de Bassiré qui se situe à un important carrefour menant à Damas vers le sud et à Homs, troisième ville du pays, plus à l'ouest.

«La route est désormais ouverte (pour l'EI) de Palmyre à la province d'al-Anbar en Irak, sans plus aucun obstacle», a relevé Mohammed Hassan al-Homsi, un militant local.

L'EI a par ailleurs consolidé ses gains dans le nord de la province d'Alep en prenant aux rebelles des villages près de la frontière turque. Les deux jours de combats ont fait 31 morts parmi les rebelles et 22 dans les rangs de l'EI.

Malgré les récents revers, le premier ministre syrien Wael al-Halqi a promis dimanche que l'armée allait «libérer chaque mètre du territoire syrien», selon l'agence Sana.

Les avancées de l'EI seront au centre des discussions entre 27 ministres des pays de la coalition internationale anti-jihadistes qui se réunissent mardi à Paris pour revoir leur «stratégie».

En Irak, les forces gouvernementales, aidées par des milices chiites, ont poursuivi ce week-end leur contre-offensive pour reprendre Ramadi, chef-lieu de la province d'Al-Anbar (ouest) conquis le 17 mai par l'EI.

Le premier ministre irakien, Haider al-Abadi, a par ailleurs affirmé dimanche que Bagdad ne prendrait pas part aux conflits opposant l'Arabie saoudite, pays à majorité sunnite, et l'Iran, à majorité chiite comme l'Irak, au Moyen-Orient.

Il a d'autre part précisé que l'armée avait perdu 2300 Humvee blindés lors de sa débandade en juin 2014 à Mossoul (nord), la deuxième ville du pays, face à l'EI. Ces véhicules de fabrication américaine ont depuis été largement utilisés par les jihadistes, notamment pour mener des attentats suicide.