Les deux frères ennemis, l'État islamique d'Irak et du Levant (EIIL) et le front Al-Nosra, la branche syrienne d'Al-Qaïda, ont décidé de fusionner à Boukamal, la principale localité frontalière entre la Syrie et l'Irak, a indiqué mercredi une ONG.

Le front Al-Nosra «a prêté allégeance à l'EIIL dans la nuit de mardi à mercredi» permettant à ce dernier d'être désormais des deux côtés de la frontière puisqu'il contrôle déjà la localité irakienne d'Al-Qaïm en Irak, selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH).

«Cet acte d'allégeance survient alors que l'EIIL progresse dans la province de Deir Ezzor», dont fait partie Boukamal, dans l'est de la Syrie sur la frontière avec l'Irak, a précisé cette organisation.

Un djihadiste de l'EIIL a confirmé l'information sur Twitter et a posté une photo montrant un commandant égyptien du front Al-Nosra avec un chef tchétchène de l'EIIL.

Issues d'Al-Qaïda en Irak, les deux organisations sont devenues rivales en Syrie et se combattent.

«Ils sont rivaux, mais ce sont tous les deux des djihadistes et des extrémistes. Cette allégeance créera des tensions avec les autres groupes rebelles, y compris les islamistes», qui contrôlaient la ville et ses environs, a précisé le directeur de l'OSDH Rami Abdel Rahmane.

Un militant à Boukamal, qui utilise pour des raisons de sécurité le pseudonyme de Hadi Salamé, a affirmé à l'AFP, via internet, que «la tension est vive dans la localité et la situation va empirer, car cette fusion causera de graves problèmes avec les tribus locales qui ne vont pas accepter ces changements», car elles sont hostiles à l'EIIL.

Un autre militant, Abdel Salam al-Hussein, a expliqué que cette fusion est intervenue après une déclaration des chefs de brigades islamistes locales excluant le front Al-Nosra du tribunal islamique, qui exerce de facto le véritable pouvoir dans beaucoup de régions rebelles.

«L'allégeance (à l'EIIL) est survenue dans un climat de tension entre Al-Qaïda et les rebelles locaux», a-t-il dit.

En avril, le front Al-Nosra allié aux rebelles islamistes avait repoussé une attaque de l'EIIL sur cette ville, faisant une centaine de morts.

Excédés par les exactions attribuées à l'EIIL et sa volonté d'hégémonie, les rebelles islamistes et «modérés» et le front Al-Nosra avaient retourné début janvier leurs armes contre leurs ex-alliés dans le combat contre le régime de Bachar al-Assad, dans les zones sous leur contrôle.

L'EIIL contrôle la province de Raqa (Nord) ainsi que des parties de celles de Hassaka (nord-est) et Deir Ezzor (Est).

Dans le nord et l'est de la Syrie, plus de 6000 personnes ont été tuées dans ces affrontements depuis janvier, selon l'OSDH.

Le chef d'Al-Qaïda Ayman al-Zawahiri avait déclaré le front Al-Nosra comme la branche officielle d'Al-Qaïda en Syrie, désavouant clairement l'EIIL, qui voulait s'imposer comme le représentant du réseau extrémiste à la fois en Irak et en Syrie.