Des dizaines de prisonniers ont commencé à être libérés des geôles syriennes à l'issue de l'amnistie présidentielle décrétée par Bachar al-Assad, a affirmé mardi à l'AFP un avocat des droits de l'homme.

Des prisonniers de conscience, y compris le journaliste Mazen Darwich, sont concernés par l'amnistie.

«Des dizaines de prisonniers de la prison d'Adra ont été libérés lundi et cela se poursuit aujourd'hui», a indiqué Anwar al-Bounni, avocat syrien basé à Damas, à la suite de l'amnistie la plus large décrétée en trois ans de guerre entre régime et rebelles.

Le procureur dans le gouvernorat de Damas Zyad Hleibi a confirmé à l'agence officielle Sana que «l'amnistie générale a commencé à être appliquée dès sa publication et le travail est en cours dans les tribunaux pour libérer les personnes concernées».

Une semaine après sa réélection controversée, M. Assad a annoncé lundi la plus large amnistie depuis le début de la révolte en 2011 et qui devrait concerner, si elle est appliquée intégralement, des dizaines de milliers de prisonniers.

C'est la première fois depuis 2011 qu'une amnistie s'étend à ceux poursuivis pour «terrorisme», terme qui désigne selon le pouvoir de Damas rebelles et militants antirégime.

D'après M. Bounni, le journaliste et défenseur des droits de l'homme Mazen Darwich, ainsi que ses collègues Hussein Ghreir et Hani Zaitani, emprisonnés depuis deux ans dans la prison d'Adra, doivent retrouver la liberté.

L'amnistie concerne également l'opposant Abdel Aziz al-Khayyer, un responsable au sein du Comité de coordination nationale (opposition de l'intérieur tolérée par le régime).

C'est également la première fois que le régime offre une amnistie aux combattants étrangers qui se rendent dans un délai d'un mois.

«Le tribunal antiterroriste et les cours criminelles passent en revue les noms des prisonniers, qui peuvent bénéficier de l'amnistie et envoient leurs listes aux différentes prisons», comme Adra et Saydnaya près de Damas, ou celle de Tadmor (Palmyre, est), a précisé l'avocat.

À Homs (centre), le gouverneur Talal Barazi a affirmé à l'AFP qu'une centaine de détenus dans le centre d'Al-Andalous sont également concernés par cette amnistie.

Ces détenus, des ex-rebelles à Homs qui «n'ont pas fait leur service militaire seront chez eux dans deux jours», a-t-il indiqué.

Selon M. Bounni, lui-même ancien prisonnier politique, l'amnistie devrait concerner les personnes déjà jugées et celles, bien plus nombreuses, croupissant sans procès dans les centres de détention des services de renseignement du régime.

«Les services de sécurité ont leurs propres listes», a-t-il indiqué. Selon l'avocat Michel Chamas, 50 000 personnes sont détenues dans les geôles des services de sécurité.

Plus de 100 000 personnes sont détenues, dont 18 000 considérées comme des disparus, car leurs familles ne connaissent rien de leur sort, selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH), une ONG syrienne qui s'appuie sur un vaste réseau de militants et de sources médicales et militaires. 

Lors des quatre précédentes amnisties, les organisations de défense des droits de l'homme avaient affirmé qu'en dépit des décrets, beaucoup de détenus n'avaient jamais retrouvé la liberté.