Des groupes islamistes combattant le régime de Bachar al-Assad ont fusionné vendredi pour constituer la plus importante force rebelle, appelée «le Front islamique», afin de faire face aux avancées du régime et aux menaces des jihadistes.

Dans le même temps, les rebelles se sont emparés d'une localité située sur la route stratégique reliant Damas à Homs (centre) qui était aux mains de l'armée depuis le début du conflit, selon une ONG syrienne et l'opposition.

«Le Front islamique est une force sociale et militaire indépendante qui a pour objectif de renverser le régime Assad (...) et de le remplacer par un État islamique juste», affirme vendredi un communiqué de cette nouvelle force.

La fusion de sept groupes islamistes avait été peu auparavant annoncée sur Facebook par Abou Firas, porte-parole de la plus grande brigade d'insurgés d'Alep (nord), Liwa al-Tawhid.

«Il n'y aura qu'un seul commandement, une seule armée - l'armée de l'islam - et une seule politique», selon Abou Firas.

Il s'agit de la plus importante fusion de groupes rebelles islamistes depuis le début du conflit en Syrie, en mars 2011.

Parmi eux figurent notamment Liwa al-Tawhid (proche des Frères musulmans), Ahrar al-Cham (salafiste), Jaïch al-islam, considéré comme proche de l'Arabie saoudite, et le Front islamique kurde.

«Si ce front se révèle solide à long terme, c'est un développement très significatif. Il s'agit d'une force militaire considérable, largement au-dessus des 50 000 hommes, qui dominerait très nettement la scène insurgée», note l'expert de la Syrie Thomas Pierret.

«Il est probable que la mise en place du front soit le fruit d'un effort commun de l'Arabie et du Qatar», ajoute ce maître de conférence de l'Université d'Édimbourg, en référence à deux pays qui soutiennent les rebelles.

Cette annonce survient après la mort lundi d'Abdel Qader Saleh, chef charismatique de Liwa al-Tawhid, tué dans un raid de l'armée syrienne.

«Mauvaise nouvelle pour le régime»

Pour Aron Lund, expert des mouvements islamistes syriens, «cette fusion est très importante si elle réussit à se maintenir, car elle regroupe les plus importantes factions et les chefs les plus connus».

«Il y a des islamistes de toutes tendances, mais pas les organisations liées à Al-Qaïda», comme l'État islamique en Irak et au Levant (EIIL) et le Front al-Nosra, indique ce spécialiste basé en Suède.

Certains groupes comme Ahrar al-Cham ou Liwa al-Tawhid continuent de faire partie du Conseil militaire suprême de l'Armée syrienne libre (ASL).

Parlant à l'AFP via internet, Abou Firas a affirmé que «les portes étaient ouvertes à toutes les factions militaires», et qu'«une commission examinait les demandes des groupes qui souhaitaient faire partie» de ce front.

Lors de rassemblements hebdomadaires contre le régime, des manifestants ont justement appelé vendredi à l'unification des rangs rebelles.

Des militants anti-régime sur le terrain ont vu dans cette annonce une «mauvaise nouvelle» pour le président Assad et les jihadistes.

Selon des membres de l'opposition et des experts, les profondes divisions jusqu'à présent au sein de la rébellion expliquent en partie les récentes avancées de l'armée, notamment dans la région de Qalamoun, proche de la frontière libanaise.

Des centaines de rebelles ont cependant pris vendredi aux forces du régime une ville de cette région, Deir Attiya, à l'exception d'un hôpital et d'une colline, selon l'Organisation syrienne des droits de l'Homme (OSDH).

La ville à majorité chrétienne a été prise par une coalition regroupant notamment l'EIIL et le Front al-Nosra, précise cette organisation qui bénéficie d'un large réseau de militants et de sources médicales.

Le conflit a poussé des millions de Syriens à se réfugier dans les pays voisins. En Égypte, 50 réfugiés venus de Syrie, arrêtés alors qu'ils tentaient de rejoindre illégalement l'Europe, ont entamé vendredi une grève de la faim pour protester contre leur détention.

En Bulgarie, le Haut commissaire aux réfugiés de l'ONU Antonio Guterres a appelé l'Europe à venir en aide aux milliers de Syriens réfugiés dans ce pays, le plus pauvre de l'UE, alors que les inquiétudes se multiplient sur leurs conditions de vie jugées «déplorables».

Alors que Russie, USA et ONU tentent de réunir régime et opposition à la même table de négociations, l'émissaire international pour la Syrie, Lakhdar Brahimi, s'est entretenu à Genève avec le chef de la diplomatie iranienne Mohammad Javad Zarif, allié de Damas, pour faire le point sur cette conférence de paix baptisée Genève 2.