La guerre d'influence des puissances régionales a entravé les progrès d'une réunion de trois jours à Istanbul de la Coalition nationale de l'opposition syrienne, une quatrième journée de débats étant désormais prévue dimanche.

Sur le terrain, l'armée syrienne a annoncé avoir pénétré samedi dans l'aéroport militaire de Dabaa, une position rebelle clé au nord de Qousseir, une semaine après le début de son offensive conjointe avec le Hezbollah contre cette ville stratégique.

Au Liban, le chef du mouvement chiite libanais Hassan Nasrallah a promis samedi à ses partisans la victoire dans la guerre en Syrie.

Sur le plan diplomatique, l'opposition syrienne, réunie à Istanbul, se montre réticente et surtout divisée au sujet d'une conférence internationale visant à réunir à Genève des représentants des deux parties, pour laquelle les préparatifs s'intensifient.

La Coalition a entamé ses réunions jeudi pour débattre notamment de sa participation à cette éventuelle conférence de paix, à l'initiative des diplomates russes et américains.

Si le régime a donné, selon la Russie, son «accord de principe» pour participer, l'opposition est très hésitante à s'engager dans des négociations alors qu'elle est en perte de vitesse sur le terrain.

Les opposants relèvent ainsi que les réunions n'ont pu se concentrer sur ce thème clé, car les demandes de pays régionaux d'élargir le nombre de membres de la Coalition ont divisé le groupe et bloqué les progrès sur le reste de l'agenda des discussions.

«Vous avez l'Arabie saoudite et les Émirats arabes unis qui s'acharnent à inclure jusqu'à 30 membres dans la Coalition nationale. Leur objectif est de réduire l'influence des Frères musulmans dans cette structure», a précisé un membre de la Coalition sous couvert d'anonymat.

Ce dernier a souligné que «de l'autre côté la Turquie, le Qatar et dans une certaine mesure la France soutiennent la Coalition telle qu'elle est», estimant «exagérées» les perceptions selon lesquelles le groupe est sous la mainmise des islamistes.

«J'espère que nous aurons de bonnes nouvelles d'ici demain», a confié samedi soir lors d'un point de presse Khaled Saleh, un porte-parole de la Coalition.

Parallèlement, le ministre français des Affaires étrangères Laurent Fabius recevra lundi à Paris ses homologues américain John Kerry et russe Serguei Lavrov pour évoquer cette conférence initiée par Washington et Moscou.

Lundi également, le Conseil des ministres des Affaires étrangères de l'UE doit se prononcer sur une levée de l'embargo sur les armes à destination de l'opposition syrienne. Plusieurs pays, comme la Suède et l'Autriche, y sont farouchement opposés.

À New York, Israël a adressé un courrier à l'ONU accusant la Syrie de chercher à provoquer un conflit, quelques jours après un nouvel incident sur le plateau du Golan dont les deux pays se rejettent la responsabilité.

La bataille de Qousseir engagée

En Syrie, «l'armée syrienne s'est infiltrée à l'intérieur de l'aéroport de Debaa par le nord-ouest, après s'être emparée de la ligne de défense des rebelles. Les combats se déroulent désormais à l'intérieur», a déclaré à l'AFP une source militaire.

Cet ancien aéroport se trouve à 6 km de Qousseir, sur la seule route au nord de la ville. D'après des militants, ce sont les forces spéciales de l'armée et le Hezbollah qui ont mené l'assaut.

Sur sa page Facebook, le militant Hadi al-Abbdallah, qui se trouve dans la ville, a lancé un cri désespéré. «O mon Dieu, Qousseir est détruite et brûle. Des centaines d'obus, de missiles tombent sur la ville».

La Tansikiyat (comité de coordination sur le terrain) de Qousseir a appelé à l'aide, également sur Facebook. «Si Qousseir tombe, nous nous relèverons plus. Aidez-nous, envoyez-nous de l'argent, de la nourriture et des médicaments».

Selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme, qui s'appuie sur un réseau de militants et de sources médicales, les violences ont fait au moins 30 morts, essentiellement des combattants rebelles, samedi dans la zone de Qousseir.

Dans un message, le chef par intérim de l'opposition syrienne, George Sabra, a déclaré à Istanbul: «Des milliers d'Iraniens et leurs collaborateurs terroristes du Hezbollah ont envahi la Syrie».

«Je dis aux gens honorables, aux moujahidine, aux héros: comme je vous ai toujours promis la victoire, je vous en promets une nouvelle», a déclaré le chef du Hezbollah lors d'une cérémonie tenue à Machghara, dans le sud-est du Liban, à l'occasion du 13e anniversaire du retrait israélien du Liban.

«La Syrie, c'est la protection arrière et le support de la résistance. La résistance ne peut rester les bras croisés quand sa protection arrière est exposée et quand son support se brise. Si nous n'agissons pas, nous sommes des idiots», a-t-il souligné.

Pour Ghassan al-Azzi, professeur de sciences politiques à l'Université libanaise, «les Iraniens ont demandé au Hezbollah de s'engager une fois pour toute et de façon publique, car cette guerre doit décider de l'avenir de l'alliance entre l'Iran et la Syrie et peut-être de toute la région».

Le mouvement chiite a dépêché 1700 hommes pour la bataille de Qousseir, selon une source proche de l'organisation.