Le président libanais Michel Sleimane a appelé vendredi le Hezbollah à la prudence concernant son engagement massif dans les combats au côté des forces de Damas, estimant que le puissant parti chiite risquait de s'embourber dans le conflit syrien.

«La Résistance (Hezbollah, ndlr) est plus noble et plus importante que tout, (elle) ne doit pas s'enliser dans les sables de la dissension, que ce soit en Syrie ou au Liban», a estimé M. Sleimane selon un communiqué, en référence à la lutte contre Israël prônée par le puissant parti.

Le président a mis le Hezbollah en garde contre cet enlisement dans les combats «que ce soit auprès d'un frère ou d'un ami», en référence au régime de Bachar al-Assad. La Syrie, qui a exercé 30 ans de tutelle politicomilitaire sur le Liban, est souvent désignée par les dirigeants libanais comme «pays frère».

Le Hezbollah, bête noire d'Israël et qui dispose d'un puissant arsenal, est en première ligne dans l'offensive lancée dimanche par les forces du régime sur Qousseir, une ville restée longtemps place forte des rebelles près de la frontière libanaise où le mouvement a perdu des dizaines de combattants.

«La Résistance a lutté (contre Israël) et libéré (le sud du Liban) non pas parce qu'il s'agissait d'une cause confessionnelle, mais d'une cause nationale», a poursuivi M. Sleimane, qui s'exprimait à l'issue d'une rencontre avec le chef de l'armée et du ministre de la Défense.

Le Hezbollah chiite soutient le régime syrien qui est dominé par les alaouites, une branche du chiisme, tandis que les rebelles en Syrie sont en majorité des sunnites.

Le Liban est profondément divisé entre partisans du régime, emmenés par le Hezbollah, et le camp hostile à Damas, à leur tête le sunnite Saad Hariri, ex-premier ministre.

Les divisions se sont exacerbées avec la révolte en Syrie, le Hezbollah s'impliquant dans la bataille et des partisans sunnites de la rébellion appelant au jihad pour venir en aide aux insurgés.

Le président Sleimane, élu en 2008, est un dirigeant qui se veut neutre et à mi-distance entre les deux camps. C'est la première fois qu'il s'exprime aussi directement sur l'implication du parti chiite en Syrie.

Il s'exprimait à la veille de la «fête de libération», qui commémore le retrait de l'armée israélienne du sud du Liban en 2000 après 22 ans d'occupation.

À cette occasion, le chef du Hezbollah, Hassan Nasrallah, doit prononcer un discours samedi au cours duquel il s'exprimera sur la Syrie.

Le rôle du Hezbollah a été dénoncé par les pays occidentaux et notamment les États-Unis qui considèrent comme «organisation terroriste» le parti parrainé par l'Iran. Le 30 avril, M. Nasrallah avait prévenu que les «amis de la Syrie» interviendraient dans ce pays si le régime était menacé.

En début de semaine, le président américain Barack Obama avait même appelé M. Sleimane pour lui exprimer ses «craintes» quant au rôle croissant du Hezbollah en Syrie.

Dans le même temps, la France a annoncé mercredi qu'elle allait proposer que la branche militaire du Hezbollah soit inscrite sur la liste des groupes terroristes de l'Union européenne en raison de son soutien au régime de Damas.