Les heurts confessionnels entre Libanais pro et anti-régime syrien ont fait lundi encore cinq morts à Tripoli, la principale ville du nord du Liban, où des tirs à l'arme automatique et de roquettes empêchaient l'armée de se déployer.

Au total, huit personnes ont péri et des dizaines d'autres ont été blessées depuis le début samedi soir de ces affrontements entre résidants des quartiers de Bab el-Tebbaneh, majoritairement sunnites et hostiles au régime syrien, et de Jabal Mohsen, alaouites et sympathisants du régime du président Bachar al-Assad.

Les tirs à l'arme automatique et les tirs de roquettes empêchaient toujours lundi l'armée de se déployer dans les deux quartiers, selon un correspondant de l'AFP.

Ces heurts ont éclaté après des échanges de tirs samedi soir entre l'armée et des islamistes réclamant la libération d'un des leurs, Chadi al-Mawlawi, 27 ans, soupçonné de «terrorisme» par les autorités, mais qui n'est selon les manifestants qu'un sympathisant de la révolte en Syrie.

Il a été inculpé lundi par la justice, mais ses partisans, qui organisent un «sit-in» depuis samedi, ont prévenu qu'ils maintiendraient leur mobilisation s'il n'était pas libéré.

Ils étaient environ 500 personnes en fin d'après-midi dans un camp improvisé et bloquaient la route principale reliant Beyrouth à Tripoli avec des bennes à ordure et des pneus auxquels ils avaient mis le feu.

«Nous partirons quand Chadi sera libéré», a affirmé Abdel Qader Hamid, militant salafiste, ajoutant: «Si l'armée essaye de nous forcer à partir, nous nous défendrons, même si 100 d'entre nous doivent mourir».

Le parlementaire tripolitain Mouin al-Meraabi a accusé l'armée de laisser la situation empirer «pour plaire à Damas» qui ne veut en aucun cas que les rebelles ou les réfugiés syriens «voient en Tripoli une zone sécurisée».

«La situation est hors de contrôle, mais l'armée ne veut pas intervenir sans un soutien politique. Nous leur avons demandé d'entrer dans la zone en leur disant que nous pouvions même marcher devant eux, mais l'armée a refusé», a ajouté le député.

De son côté, un responsable de la sécurité a estimé sous le couvert de l'anonymat que les autorités finiraient par reprendre le contrôle de la situation, mais que cela prendrait du temps, car la rue est toujours en ébullition.

Plusieurs dirigeants politiques ont lancé des appels au calme pour mettre fin à ces heurts confessionnels sur fond de crise politique en Syrie, fréquents dans le nord du Liban, pays longtemps sous tutelle politique et militaire de la Syrie voisine.

Parmi eux, le premier ministre Najib Mikati, sunnite et originaire de Tripoli, où il s'est rendu dimanche, ainsi que Saad al-Hariri, également sunnite et dirigeant de l'opposition anti-syrienne, qui a appelé à la «retenue» pour éviter le «chaos», dénonçant toutefois les conditions de l'arrestation de M. Mawlawi.

Les autorités syriennes affirment que des armes et des combattants passent clandestinement depuis le Liban pour venir en aide aux rebelles qui cherchent à renverser le régime Assad, après 14 mois de révolte réprimée dans le sang.

Le Liban est divisé entre le camp du Hezbollah, qui domine le gouvernement avec le soutien de Damas et Téhéran, et l'opposition, soutenue par Washington et l'Arabie saoudite et hostile au régime syrien.