Les forces syriennes ont connu mercredi leurs plus lourdes pertes depuis l'instauration d'un cessez-le-feu il y a trois semaines, avec la mort de 22 de leurs membres dans des combats avec des déserteurs près de Damas et dans la région d'Alep.

Quinze membres des forces de sécurité, dont deux colonels, ont péri dans une embuscade tendue par les rebelles - la plus meurtrière depuis le 12 avril - dans la province d'Alep (nord) où deux rebelles ont également trouvé la mort, selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH).

Sept soldats et un déserteur ont en outre été tués lors de combats dans plusieurs localités proches de Damas. Un civil a été tué par les troupes loyalistes à Deraa (sud) et deux autres à Daraya, près de Damas, où cinq soldats ont été blessés dans des combats nocturnes, selon l'OSDH.

L'armée bombardait par ailleurs des localités dans la région de Homs (centre) et de Deir Ezzor (est), brûlant également des maisons de militants, a rapporté l'ONG basée en Grande-Bretagne.

Cette intensification des violences, avec 28 morts en une journée, intervient en dépit du déploiement depuis le 16 avril des premiers observateurs de l'ONU chargés de surveiller une trêve instaurée dans le cadre du plan de paix de l'émissaire international Kofi Annan, et jusqu'ici continuellement ignorée.

Le général norvégien Robert Mood, chef de la mission de l'ONU en Syrie, a reconnu que le cessez-le-feu restait «précaire» mais a assuré à la chaîne Sky News que la présence des observateurs «calmait» la situation.

Militants et observateurs ont toutefois dénoncé des violences meurtrières juste après leur passage.

«La situation est volatile», a estimé un des observateurs, le lieutenant-colonel du Bangladesh Chowduri Farhad, de retour d'une mission dans un quartier rebelle de Homs, où des rafales d'armes automatiques et un tir de mortier ont été entendus.

Mardi, l'ONU a accusé le régime et les opposants de violer la trêve, soulignant que les observateurs avaient constaté que des «armes lourdes» circulaient toujours dans les villes, en violation du plan Annan.

Le régime de Bachar al-Assad avait pourtant accepté cette initiative tout comme la rébellion armée, bien moins équipée que les troupes gouvernementales. Mais celle-ci avait prévenu qu'elle riposterait à toute attaque de l'armée.

Les insurgés assurent défendre les civils face à la répression de la révolte populaire qui a éclaté le 15 mars 2011 contre le régime, qui ne reconnaît pas l'ampleur de la contestation et affirme combattre des «bandes terroristes».

Peu avant l'instauration de la trêve, les forces syriennes ont tué au moins 95 civils, a dénoncé Human Rights Watch en parlant de «crimes de guerre». «Alors que les diplomates discutaient des détails du plan Annan, les chars et les hélicoptères syriens attaquaient les villes», selon HRW.

Outre l'arrêt des hostilités, le plan Annan prévoit également la libération des personnes incarcérées dans le cadre de la révolte qui secoue le pays depuis plus de 13 mois.

Le Conseil national syrien (CNS), principale coalition de l'opposition, a appelé l'ONU à voter une résolution contraignant le régime à mettre fin à l'«escalade des arrestations, des meurtres et de la torture systématique de détenus» et demandé aux observateurs de visiter les centres de détention.

Un responsable des Affaires humanitaires de l'ONU se trouve actuellement en Syrie pour «coordonner» son action avec le gouvernement en vue d'aider un million de personnes touchées par les violences, qui ont également poussé plus de 65 000 Syriens à l'exil, selon une estimation de l'ONU.

Mercredi, le sénateur américain Joe Lieberman a rencontré des représentants de réfugiés syriens dans le nord du Liban et effectué une tournée à la frontière entre les deux pays, a rapporté à l'AFP un responsable local.

Autre victime des violences, l'économie, qui devrait connaître une contraction «significative» en 2012, selon le Fonds monétaire international (FMI).

L'ONU, qui doit déployer à terme 300 observateurs, a affirmé que la Syrie avait refusé des visas à trois d'entre eux. Le ministère syrien des Affaires étrangères a simplement confirmé un désaccord sur les nationalités.

Selon des diplomates, le gouvernement rechigne à laisser entrer des citoyens de pays occidentaux hostiles au régime Assad, ou de pays arabes comme l'Arabie saoudite et le Qatar qui soutiennent l'opposition.

Depuis le début de la contestation, plus de 11 100 personnes, en majorité des civils, ont péri dans les violences, selon l'OSDH, et des dizaines de milliers de personnes ont été arrêtées selon des ONG.