Après s'être heurtés deux fois aux vetos chinois et russe, les membres du Conseil de sécurité ont réussi à parler d'une seule voix, hier, sur la situation en Syrie. Dans une «déclaration présidentielle», le Conseil souscrit au plan conçu par Kofi Annan pour mettre fin à la violence dans le pays du Moyen-Orient et met la table pour d'éventuelles sanctions.

Contrairement à une résolution, la déclaration présidentielle faite hier par l'organe onusien n'est pas contraignante. Cependant, pour arriver à la rendre publique, les 15 membres du Conseil de sécurité, y compris la Russie et la Chine -deux principaux alliés de la Syrie-, ont dû s'entendre sur le texte de manière consensuelle.

Le Conseil demande notamment aux autorités syriennes de travailler avec M. Annan, envoyé spécial des Nations unies en Syrie, dans le but d'arriver à un «arrêt effectif» de «toutes les formes de violence armée». Le cessez-le-feu proposé se ferait sous la supervision des Nations unies.

Dans le plan de M. Annan, auquel le Conseil de sécurité souscrit «sans réserve», il est aussi question d'acheminer des denrées humanitaires dans les zones du pays les plus frappées par les combats, du respect du droit de manifester, de la libération de prisonniers politiques et de la libre circulation des médias.

Le Conseil, qui se dit «ex-trêmement préoccupé par la détérioration de la situation en Syrie», demande à M. Annan de lui faire rapport sur la mise en oeuvre de son plan et note qu'il pourrait prendre «toute autre mesure qu'il jugera appropriée» à la lumière de ces rapports.

Changement de ton

Le vocabulaire utilisé dans la déclaration a fait l'objet de «dures négociations», selon des diplomates qui ont accordé des entrevues à l'AFP sous le couvert de l'anonymat. En édulcorant les termes utilisés, la France aurait réussi à convaincre la Chine et la Russie de donner leur appui à la déclaration.

Après l'adoption de la déclaration, le ministre des Affaires étrangères de la Russie a claironné que l'énoncé ne contient «ni ultimatum ni menace» pour le régime de Bachar al-Assad à Damas.

Cependant, selon un expert des relations internationales, la déclaration n'est pas aussi inoffensive qu'elle ne le paraît et marque un changement de ton. «Une déclaration est une demi-mesure. Ce n'est pas une résolution, mais ce n'est pas non plus un refus de faire quelque chose. C'est un précédent. Ce sera difficile pour la Chine et la Russie de faire marche arrière après cela et de ne rien faire si le régime syrien ne respecte pas les recommandations de Kofi Annan», croit Houchang Hassan-Yari, professeur de sciences politiques au Collège militaire royal du Canada.

Or, M. Yassan-Yari doute fort du désir du président syrien Bachar al-Assad de se soumettre aux recommandations de l'ancien secrétaire général des Nations unies. «Le régime syrien a déjà fait des promesses semblables, mais n'a rien fait.»

Selon les Nations unies, au moins 8000 personnes ont trouvé la mort en Syrie depuis le début des manifestations, en février 2012. Le Conseil de sécurité n'a à ce jour pas réussi à adopter une résolution pour condamner les agissements du régime. En octobre 2011 comme en février 2012, la Russie et la Chine ont fait avorter deux résolutions en opposant leur veto.

Dans sa proposition en six points, l'envoyé spécial des Nations unies en Syrie, Kofi Annan, fait les demandes suivantes aux autorités syriennes:

Mettre en place un «processus politique ouvert», dirigé par les Syriens, pour répondre aux aspirations et aux inquiétudes du peuple syrien.

Le plan Annan en six points

> Mettre fin à toute forme de violence dans le but d'obtenir un cessez-le-feu, sous la supervision de l'envoyé spécial et des Nations unies. Dans un premier temps, la Syrie devrait mettre fin aux mouvements de troupes en direction des agglomérations et devrait cesser d'utiliser des armes lourdes.

> Assurer l'acheminement de l'aide humanitaire dans les zones touchées par les combats et mettre en place une «pause humanitaire» de deux heures par jour.

> Libérer les personnes détenues arbitrairement, notamment celles détenues après avoir pris part à des activités politiques pacifiques.

> Assurer aux journalistes la liberté de circulation dans tout le pays. > Respecter la liberté d'association et le droit de manifester pacifiquement.