Les détenus en Syrie, où un mouvement de contestation est réprimé dans le sang depuis un an, sont confrontés «à un monde cauchemardesque de torture systématique», qui ramène le pays des décennies en arrière, a dénoncé Amnesty International mercredi.

«L'ampleur de la torture et des mauvais traitements en Syrie a atteint un niveau jamais vu pendant des années et rappelle l'ère sombre des années 1970 et 1980», a affirmé l'ONG dans un rapport basé sur le témoignage de survivants s'étant enfuis en Jordanie.

La situation «est désormais très semblable à celle vécue par les détenus sous l'ancien président Hafez al-Assad - un monde cauchemardesque de torture systématique», a affirmé Ann Harrison, du programme d'Amnesty au Moyen-Orient.

Le rapport, publié à la veille du premier anniversaire du début de la révolte contre le régime de Bachar al-Assad, le fils d'Hafez, fait état de 31 méthodes de torture ou autres mauvais traitements utilisés par les forces de sécurité syriennes et les milices («chabbiha»).

«Beaucoup de victimes ont dit avoir commencé à être battues lors de leur arrestation», puis les violences se sont intensifiées «à leur arrivée dans le centre de détention», leurs geôliers les frappant alors «avec des bâtons, des crosses de fusil, des fouets, des poings, des câbles», a ajouté Amnesty.

Selon les témoignages recueillis auprès de 25 anciens détenus, la torture ou les mauvais traitements atteignaient leur paroxysme au moment des interrogatoires.

«Plusieurs survivants ont raconté la pratique du «dulab» (pneu en arabe), durant laquelle la victime est coincée dans un pneu - souvent hissé en hauteur - et battue, parfois avec des câbles ou des bâtons».

D'autres techniques, de plus en plus utilisées, consistent à suspendre le détenu au-dessus du sol et à le frapper, ou à le soumettre à des chocs électriques.

L'un des survivants, prénommé Tareq, a raconté à Amnesty comment, alors qu'il était interrogé dans le quartier de Kafr Soussa à Damas, il avait été forcé d'assister au viol d'un autre prisonnier, Khaled: «L'officier l'a violé contre le mur. Khaled pleurait, en frappant sa tête contre le mur.

Ann Harrison a affirmé que les témoignages recueillis attestaient que des «crimes contre l'humanité» étaient commis en Syrie.

«Les Syriens responsables de la torture - y compris ceux ayant donné les ordres - doivent n'avoir aucun doute sur le fait qu'ils seront confrontés à la justice», a-t-elle dit.

Amnesty a appelé le Conseil de droits de l'Homme de l'ONU à étendre le mandat de sa commission d'enquête sur la Syrie, en «renforçant sa capacité de contrôle (...) en vue de poursuites».