La paralysie de l'ONU et le refus de toute intervention militaire obligent les pays qui réclament la fin de la répression à envisager un scénario déjà vu en Libye: la livraison d'armes aux rebelles et la reconnaissance de l'opposition comme seule interlocutrice.

Depuis le blocage de Moscou et Pékin au Conseil de sécurité et l'intensification du pilonnage de Homs, épicentre de la contestation, les appels à venir en aide aux rebelles syriens se multiplient en Syrie et parmi les opposants en exil.

Le Conseil national syrien (CNS), qui regroupe la majeure partie des opposants, et l'Armée syrienne libre, qui revendique 40 000 soldats ayant fait défection, appellent hommes d'affaires syriens et arabes à financer les opérations menées par les rebelles contre le régime de Bachar al-Assad.

Mais certains rebelles demandent plus encore. «Les effectifs, nous les avons, il nous manque juste les armes», a déclaré cette semaine un commandant de l'Armée syrienne libre (ASL) qui s'est simplement identifié comme étant Mohammed.

«Nous voulons un soutien militaire. Nous avons besoin de matériel», a-t-il déclaré lors d'une conférence organisée près de Damas et diffusée via internet.

De son côté, le sénateur américain John McCain a appelé les États-Unis à envisager d'armer l'opposition. «Nous devrions commencer à envisager toutes les options, y compris celle consistant à armer l'opposition. Le bain de sang doit cesser», a-t-il déclaré.

Dans le même temps, CNN révélait que le Pentagone et le Centcom, le commandement militaire américain chargé du Moyen Orient et de l'Asie centrale, procédaient à un «passage en revue préliminaire des capacités militaires américaines» pour se tenir prêts à tout scénario.

«Dans ce genre d'analyse, les militaires étudient généralement toutes les options, de l'aide humanitaire, du soutien aux groupes de l'opposition, ainsi que des frappes militaires, même si ces dernières sont peu vraisemblables», estime CNN.

Pour certains membres du CNS, il est toutefois trop tôt pour demander des armes.

«On peut demander de l'argent, demander de l'aide logistique. Demander des armes? Pourquoi pas. Mais avant cela, il faut surtout obtenir la fin des livraisons d'armes russes, chinoises et iraniennes au régime», estime Imad Houssari, membre du CNS et également porte-parole des Comités locaux de coordination (LCC) qui organisent le mouvement en Syrie.

Pour sa part, le Qatar, qui s'est imposé sur la scène internationale à la faveur de la guerre en Libye, réfléchit aux moyens d'aider les rebelles tout en poursuivant ses efforts diplomatiques, notamment au sein du Conseil de coopération du Golfe (CCG).

L'émir du Qatar, cheikh Hamad Ben Khalifa Al Thani, s'est dit favorable à l'envoi de troupes arabes en Syrie afin de «mettre fin à la tuerie». Après le double veto sino-russe, il pourrait se résoudre à financer et armer les rebelles, voire à envoyer des instructeurs pour prêter main forte à l'Armée syrienne libre (ASL).

À Damas, le quotidien officiel syrien as-Saoura accusait dès janvier le Qatar de financer et d'armer les insurgés.

Mais c'est dans le domaine de la reconnaissance du CNS, un conseil composé d'islamistes, de nationalistes, de libéraux et d'indépendants, adoubé par les Frères musulmans majoritaires, que le Qatar pourrait concentrer ses efforts dans un premier temps.

Selon plusieurs membres du CNS interrogés par l'AFP, l'opposition syrienne espère une reconnaissance par plusieurs pays arabes dans les tout prochains jours.

Actuellement réuni à Doha, au Qatar, le CNS attend beaucoup des réunions dimanche au Caire de la Ligue arabe et du CCG.

À l'heure actuelle, seule la Libye reconnaît le CNS comme seul interlocuteur légitime en Syrie. Mais les pays du CCG, dont le Qatar fait partie, ont décidé mardi d'expulser les ambassadeurs de Syrie dans leurs pays et de rappeler les leurs en poste à Damas. Et pourraient aller encore plus loin.