Plus de 40 personnes ont été tuées et 150 blessées vendredi dans deux attentats suicide à la voiture piégée à Damas, les autorités syriennes les imputant à Al-Qaïda, alors que l'opposition accusait le régime, dont la répression de la révolte n'a pas connu de répit.

Ces attentats, sans précédent depuis le début de la révolte mi-mars contre le régime du président Bachar al-Assad, sont survenus au lendemain de l'arrivée d'une délégation arabe qui doit préparer la prochaine venue d'observateurs.

Le ministère de l'Intérieur a indiqué dans un communiqué que 44 personnes avaient été tuées et 166 blessées dans ces attentats, derrière lesquels il a vu «la main d'Al-Qaïda».

Les attaques, qui ont eu lieu à quelques minutes d'intervalle dans le quartier de Kafar Soussé, dans l'ouest de la capitale, ont visé la Direction de la sûreté générale, le plus important service de renseignement civil, ainsi qu'un bâtiment de la sécurité militaire.

La télévision a montré des images de civils évacuant des cadavres calcinés ou mutilés, et la chaussée maculée de sang.

«Le terrorisme a voulu que le premier jour des observateurs à Damas soit une journée tragique mais le peuple syrien fera face à la machine à tuer soutenue par les Européens, les Américains et certaines parties arabes», a déclaré le vice-ministre des Affaires étrangères Fayçal Meqdad sur le lieu de l'un des attentats.

Il a assuré que la Syrie allait «faciliter au maximum» la mission de la Ligue arabe».

Le Conseil national syrien (CNS), principal mouvement d'opposition, a imputé au régime la «responsabilité directe» des attentats, dans un communiqué reçu par l'AFP.

Le régime «a voulu adresser un message de mise en garde aux observateurs arabes, pour qu'ils ne s'approchent pas des centres de sécurité», et donner l'impression «au monde qu'il fait face à un danger venu de l'étranger et non pas à une révolution populaire», selon le CNS.

Le CNS accuse en outre le régime d'avoir transféré «des milliers de détenus (...) vers des casernes militaires fortifiées» où les observateurs de la Ligue arabe n'ont pas accès, et «mis en garde (...) tous ceux qui travaillent dans les hôpitaux pour qu'ils ne parlent pas aux observateurs arabes».

A l'étranger, plusieurs capitales occidentales, qui ont condamné les attentats, se sont inquiétées de leurs conséquences sur le travail des observateurs.

Washington a estimé qu'ils ne devaient pas remettre en cause la mission des observateurs.

La France s'est dite «préoccupée par les informations faisant état de manipulations orchestrées depuis plusieurs jours par Damas pour maquiller la réalité de la répression» aux yeux des observateurs arabes, évoquant notamment le transfert «des prisonniers politiques dans des lieux de détention secrets».

Londres a demandé à Damas de tenir ses engagements à l'égard de la Ligue arabe et de laisser un «libre accès» à ses observateurs.

Le chef de l'ONU Ban Ki-moon s'est dit «très inquiet» de l'escalade de la violence, appelant Damas à appliquer «complètement» le plan de la Ligue arabe.

La Russie, à qui les pays occidentaux reprochent de bloquer à l'ONU l'adoption d'une résolution ferme sur la Syrie, a qualifié les attentats d'acte «barbare» visant à attiser «la confrontation».

L'adjoint du secrétaire général de la Ligue arabe, Samir Seif al-Yazal,  arrivé jeudi à Damas pour diriger la mission chargée de préparer la venue d'observateurs arabes, s'est rendu sur les lieux du drame et a assuré que son travail allait se poursuivre.

Cité par l'agence de presse égyptienne Mena, il a indiqué que «la mission d'observation partirait pour Damas lundi», et qu'elle comprendrait «plus de 50 experts arabes dans différents domaines, notamment politique, droits de l'Homme, militaire». Dans un premier temps, la venue des observateurs avait été annoncée pour dimanche.

Les militants anti-régime, dénonçant l'apathie de la Ligue arabe face à la répression, ont manifesté vendredi dans plusieurs villes du pays contre la signature du protocole sur l'envoi des observateurs, qualifié de «protocole de la mort».

Quatorze civils ont été tués vendredi par les forces de sécurité, dont huit à Homs (centre), deux à Hama (nord), deux à Douma, dans la banlieue de Damas, un à Deraa (sud) et un à Idleb (nord-ouest), selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH).

Selon une estimation de l'ONU, la répression en Syrie a fait au moins 5.000 morts depuis la mi-mars. Les autorités syriennes, qui attribuent les troubles à des «bandes armées», ont pour leur part annoncé plus de 2.000 morts dans les rangs de l'armée et des services de sécurité.