La répression en Syrie a fait «probablement plus» de 5000 morts, a affirmé lundi la haut commissaire aux droits de l'homme de l'ONU, Navi Pillay, s'en prenant devant le Conseil de sécurité des Nations unies à l'inaction de la communauté internationale.

«Aujourd'hui j'ai rapporté le fait que le nombre (des morts) excède 5000», a-t-elle dit lors d'un point de presse à l'issue de la réunion du Conseil.

L'ONU a des informations selon lesquelles plus de 200 personnes ont été tuées depuis le 2 décembre par les forces du président Bachar al-Assad, a indiqué Mme Pillay, selon des diplomates qui ont assisté à la réunion du Conseil.

Le dernier bilan de l'ONU était de plus de 4000 personnes tuées par les forces syriennes depuis le début du mouvement de contestation du régime en mars dernier. Interrogé sur ce bilan la semaine dernière, le président Assad avait mis en doute la crédibilité de l'ONU.

Mme Pillay s'exprimait devant le Conseil en réponse à une demande de la France, de la Grande-Bretagne et de l'Allemagne.

Le Conseil de sécurité n'arrive pas à se mettre d'accord sur une résolution qui condamnerait la répression en Syrie. Un double veto russo-chinois a torpillé le 4 octobre un projet de résolution en ce sens. Depuis, la Russie, alliée du régime syrien, n'a pas donné de signe d'assouplissement.

«Des informations crédibles réunies par mon personnel démontrent une tendance à l'usage systématique et étendu de la torture lors des interrogatoires», a assuré Mme Pillay, toujours selon des diplomates.

Citant des sources dignes de foi, Mme Pillay a indiqué que plus de 300 mineurs avaient été tués par les forces syriennes, dont 56 pour le seul mois de novembre. Les écoles ont été utilisées comme centres de détention.

«Tuer des enfants en les frappant ou en leur tirant dessus pendant les manifestations» est une pratique «largement répandue» tout comme «la torture et les mauvais traitements», a-t-elle ajouté.

«L'inaction de la communauté internationale va enhardir les autorités syriennes et assurer l'impunité aux auteurs» de ces tueries, a-t-elle dit.

A l'issue de l'exposé de Navi Pillay, même Vitali Tchourkine, ambassadeur russe à l'ONU, s'est dit «troublé». «Nous sommes tous unis par le fait que nous sommes extrêmement troublés par les développements tragiques en Syrie de ces derniers mois et par le fait que nous voudrions que cela cesse», a-t-il déclaré.

La position de la Russie n'a pas bougé pour autant, a résumé M. Tchourkine. «Ce que la Russie a demandé est le dialogue. Malheureusement nous avons vu certains membres-clés de la communauté internationale et du Conseil de sécurité changer de vitesse et se tourner vers le mode "changer de régime" (en Syrie), décourageant le dialogue à l'intérieur de la Syrie et entre la Ligue arabe et la Syrie», a-t-il poursuivi. «C'est très dangereux», a-t-il prévenu.

A l'opposé, l'ambassadeur de France à l'ONU a vertement mis en cause l'inaction du Conseil de sécurité, «moralement responsable de ce qui se passe aujourd'hui en Syrie». «La France et d'autres membres du Conseil de sécurité considèrent que le silence du Conseil est un scandale», a-t-il poursuivi.

«Nous pensons maintenant que le Conseil de sécurité doit agir», a pour sa part côté affirmé l'ambassadeur britannique à l'ONU Mark Lyall Grant. «Il est intolérable que le Conseil soit condamné à demeurer silencieux», a renchéri l'ambassadeur allemand aux Nations unies Peter Wittig, dont le ministre des Affaires étrangères Guido Westerwelle s'était auparavant dit «choqué» par ce qu'il avait entendu de la situation en Syrie.

«Nous estimons incroyable que le Conseil de sécurité n'ait pas parlé ces derniers mois», a quant à elle Mme Rosemary DiCarlo, ambassadrice adjointe des Etats-Unis à l'ONU.