Des dizaines de milliers de personnes ont manifesté vendredi contre Bachar al-Assad dans le centre de la Syrie, dont les autorités ont été formellement accusées par l'ONU de «crimes contre l'humanité» après la mort de plus de 4000 personnes en neuf mois de répression.

Selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH), les manifestations les plus importantes se sont déroulées dans la région de Homs, principal foyer de la contestation anti-régime, et dans la ville de Hama, plus au nord.

«Dans 17 quartiers de Homs et dans au moins neuf localités avoisinantes, des dizaines de milliers de personnes ont appelé à la mise en place d'une zone tampon pour assurer leur protection», a affirmé à l'AFP le président de l'OSDH Rami Abdel Rahmane.

«Hama a connu vendredi ses plus importantes manifestations depuis l'entrée de l'armée dans cette ville en août» pour mater la contestation, a-t-il ajouté.

D'autres manifestations de moindre envergure ont eu lieu à Alep (nord), la province de Damas et dans la région de Deraa (sud).

«L'ASL me protège, la zone tampon me protège», pouvait-on lire sur une pancarte brandie par un manifestant à Alep, selon des images publiées sur YouTube, en référence à l'«Armée syrienne libre» formée de déserteurs, et à la possibilité envisagée par la Turquie de créer une zone tampon à la frontière.

Parallèlement, des marches pro-Assad ont eu lieu dans plusieurs villes, notamment à Damas et dans les villes côtières de Jablé et Tartous, pour «dénoncer les mesures prises par la Ligue arabe contre la Syrie et rejeter les tentatives d'ingérence dans ses affaires intérieures», selon l'agence de presse officielle Sana.

Les mesures adoptées contre le régime de Damas ne semblent cependant pas avoir réussi à faire cesser les violences qui ont fait cinq nouvelles victimes civiles vendredi.

Ainsi, à Homs (centre), une femme et un homme âgé ont été tués et 18 autres personnes blessées par des tirs des forces de sécurité à des points de contrôle, selon l'OSDH qui a fait état de «dissensions entre militaires» dans ce haut lieu de la contestation.

À Hama, plus au nord, un homme de 35 ans a péri sous les balles d'un franc-tireur, a indiqué la même source qui fait état aussi de la mort d'un homme, tué par les tirs des forces gouvernementales à Saraqeb (région d'Idleb), dans le nord-ouest du pays, et d'un autre à Deir Atiyyé (région de Damas).

D'autre part, à la frontière libanaise, des dizaines de personnes ont été blessées vendredi par des tirs à la mitrailleuse lourde à Tall Kalakh, a indiqué l'OSDH, selon qui cette localité de la province de Homs est le théâtre depuis mercredi de plusieurs attaques menées par les forces gouvernementales.

Jeudi, les déserteurs avaient quitté cette ville de l'ouest de la Syrie pour lui éviter une opération militaire d'envergure.

Selon une source syrienne, les combats ont commencé à la suite «d'une infiltration d'hommes armés à partir du Liban», où selon un responsable et une source médicale locale, trois personnes ont été blessées dans une zone frontalière vendredi par des tirs provenant de la Syrie voisine.

Jeudi, des déserteurs ont tué huit personnes dans une attaque contre un siège des services de renseignements suivie d'affrontements dans la province d'Idleb. Deux militaires dissidents ont en outre été tués par les forces gouvernementales dans leur voiture près de la frontière syro-turque, selon l'OSDH.

Ces violences impliquant des déserteurs surviennent alors que le Conseil national syrien (CNS), qui regroupe une grande partie de l'opposition, et l'ASL, formée des déserteurs, ont convenu de coordonner leurs efforts contre le régime lors d'une rencontre lundi en Turquie.

À Genève, la responsable des droits de l'homme de l'ONU, Navi Pillay, a évoqué le rapport accablant publié lundi par la commission d'enquête mandatée par le Conseil des droits de l'homme (CDH) de l'ONU sur la Syrie, faisant état de «crimes contre l'humanité».

Selon un des experts de la commission, les forces de sécurité avaient tué 56 enfants pour le seul mois de novembre, le plus meurtrier depuis le début des violences dans ce pays en mars.

L'UE avait annoncé jeudi de nouvelles sanctions contre la Syrie en raison de la poursuite de la répression. Douze personnes et 11 sociétés ont été rajoutées à la liste de gels d'avoirs et d'interdictions de visa, notamment deux ministres, des militaires, deux médias et des sociétés pétrolières.

«Nous allons cesser nos activités en Syrie afin de nous conformer aux sanctions», a annoncé vendredi à l'AFP un porte-parole du géant pétrolier anglo-néerlandais Shell.