La coalition électorale dirigée par le parti des Frères musulmans a menacé de boycotter les premières législatives depuis la chute du président Hosni Moubarak prévues fin novembre, aggravant la crise autour de la gestion de la transition par le pouvoir militaire en place.

La coalition formée autour de la confrérie islamiste exige principalement l'abandon d'une disposition électorale jugée favorable au retour, sous couvert de candidatures «indépendantes», de proches du pouvoir de M. Moubarak, renversé le 11 février.

Elle réclame aussi dans un communiqué une date ferme pour l'élection présidentielle, qui permette «la remise du pouvoir à une autorité civile d'ici la fin juin 2012».

La coalition ajoute qu'elle se réunira dimanche pour examiner la réponse du pouvoir militaire à ses exigences.

La loi électorale prévoit de réserver un tiers des sièges à des candidats sans affiliation partisane, élus au scrutin uninominal, qui ne pourront rejoindre aucun groupe politique une fois élus.

Les autres parlementaires seront élus à la proportionnelle sur des listes présentées par des partis.

Le parti des Frères, «Liberté et Justice», et ses alliés -notamment le parti libéral Wafd- mais aussi de nombreuses autres formations, dénoncent un dispositif accusé de favoriser, grâce à un fort quota d'indépendants, d'anciens barons du parti de M. Moubarak, aujourd'hui dissout, mais toujours actif au travers de ses réseaux locaux.

«Nous refusons de participer aux élections si l'article 5 de la loi électorale (réservant un tiers des sièges à des indépendants) n'est pas annulé», a affirmé dans un communiqué publié mercredi tard dans la soirée «la coalition démocratique» formée autour des Frères musulmans.

«Si les partis ne peuvent pas présenter de candidats pour un tiers des sièges, cela signifie un affaiblissement des blocs parlementaires alors que le prochain gouvernement devrait être un gouvernement de coalition nationale», a également déclaré à l'AFP Essam el-Erian, vice-président du parti des Frères.

Les élections doivent débuter le 28 novembre prochain pour l'Assemblée du peuple (chambre basse) et le 29 janvier pour le Sénat (Choura, chambre haute aux pouvoirs plus limités).

Ces élections sont un jalon capital dans la transition vers un régime civil, promis par les militaires qui tiennent les rênes du pays depuis le départ de M. Moubarak.

La remise du pouvoir aux civils ne sera toutefois complète qu'une fois que le pays aura élu un président, suivant un calendrier qui n'est pas encore connu.

Crédités du soutien de quelque 35% de la population selon un récent soudage, les Frères musulmans sont considérés comme le mouvement le plus puissant et le mieux organisé d'Égypte.

Leur menace de boycottage s'ajoute à la montée des critiques contre le Conseil suprême des forces armées (CSFA), accusé de manquer de transparence et de perpétuer le dispositif répressif du passé.

Une vingtaine de partis et mouvements issus du soulèvement anti-Moubarak ont ainsi appelé à manifester vendredi sur l'emblématique place Tahrir du Caire pour dénoncer la manière dont l'armée gère la transition du pays.

Les Frères musulmans et leurs alliés ont toutefois indiqué qu'ils ne se joindraient pas à ces rassemblements, et attendaient dimanche pour voir comment l'armée réagirait à leur menace de boycottage électoral.

Les manifestations de vendredi visent notamment à protester contre l'extension du champ d'application de la loi sur l'état d'urgence, en vigueur sans discontinuer du temps de M. Moubarak.

Les États-Unis ont également appelé mercredi, par la voix de la secrétaire d'État Hillary Clinton, l'Égypte à lever l'état d'urgence au plus tôt, et non en juin 2012 comme évoqué par l'armée.

Les manifestants réclament également l'arrêt des milliers de procès de civils en cours devant des tribunaux militaires.