Plus de 1000 personnes ont été blessées, mercredi, dans la capitale égyptienne, où les forces de sécurité ont affronté des milliers de manifestants pour une deuxième journée consécutive.

Les manifestants exigent que les dirigeants militaires de l'Égypte accélèrent les procédures judiciaires contre les membres des forces de sécurité accusés d'avoir commis des actes de brutalité pendant le soulèvement populaire qui a forcé le président Hosni Moubarak à démissionner.

Dans des scènes qui rappelaient la révolution de février, des policiers antiémeute se sont déployés autour des bureaux du ministère de l'Intérieur au Caire et ont tiré des gaz lacrymogènes contre les manifestants qui lançaient des pierres et des cocktails Molotov. L'affrontement a laissé les rues jonchées de débris, tandis qu'un épais nuage de fumée blanche recouvrait le secteur.

En fin d'après-midi, des militaires, appuyés par des véhicules blindés, ont pris la relève des policiers antiémeute qui protégeaient le ministère de l'Intérieur, fermant toutes les rues menant au complexe, selon l'agence officielle égyptienne MENA.

Ces manifestations témoignent des bouleversements en cours en Égypte, près de cinq mois après le départ d'Hosni Moubarak. Le pays fait face à une crise économique qui s'aggrave et à une hausse de la criminalité favorisée par l'effet de vide dans le dispositif de sécurité.

Le jugement des responsables de la mort de quelque 850 manifestants pendant le soulèvement de février, ainsi que des collaborateurs du régime accusés de corruption, est l'une des questions les plus controversées dans l'Égypte post-Moubarak.

Plusieurs Égyptiens accusent le conseil militaire au pouvoir d'être trop révérencieux envers les personnalités de l'ancien régime et trop indulgent envers les hauts dirigeants de la police accusés d'avoir ordonné le meurtre de manifestants.

Une manifestante, Gigi Ibrahim, a affirmé que les forces de sécurité avaient tiré des gaz lacrymogènes contre la foule mercredi.

«C'était comme le 25 janvier», a-t-elle dit, en référence au premier jour du soulèvement. «Les manifestants sont très en colère, soit parce que les changements ne sont pas venus, soit parce le Conseil suprême des forces armées n'en a pas fait assez» pour répondre à leurs demandes, a-t-elle ajouté.

Selon le ministre de la Santé cité par l'agence MENA, quelque 900 blessés ont été soignés dans les rues par des médecins et des infirmières volontaires, et plus de 120 autres ont été transportés à l'hôpital en ambulance.

La plupart des blessés souffrent d'inhalation de gaz ou de commotion cérébrale, selon les autorités. Au moins 18 véhicules et 11 magasins ont été endommagés.

Le conseil militaire a publié une déclaration sur sa page Facebook, affirmant que les affrontements avaient pour but de «déstabiliser le pays» et de créer des dissensions entre les manifestants et les forces de sécurité. Les dirigeants appellent les Égyptiens à ne pas participer aux manifestations.

Les affrontements ont débuté mardi soir, quand une centaine de personnes affirmant être des proches des victimes de la révolution ont tenté d'entrer de force dans une cérémonie en mémoire de 10 personnes tuées pendant le soulèvement. Une échauffourée a éclaté quand les gardes de sécurité les ont empêchés d'entrer dans la salle.

La police a arrêté sept personnes, mais les autres manifestants se sont déplacés vers l'édifice de la télévision nationale, de l'autre côté du Nil. Ils ont convaincu d'autres proches de victimes qui manifestaient devant l'édifice de se joindre à eux.

Ensemble, ils ont marché vers les bureaux du ministère de l'Intérieur, où ils ont affronté la police, avant de se diriger vers la place Tahrir, épicentre du soulèvement de février. Ils ont encore affronté les policiers, jusqu'à ce que les autorités ordonnent aux forces de l'ordre de se retirer.

Au plus fort de la manifestation mardi soir, quelque 6000 manifestants occupaient la place Tahrir.

Mercredi soir, les affrontements étaient surtout concentrés dans les rues menant au ministère de l'Intérieur, près de l'Université américaine du Caire.

La place Tahrir était fermée à la circulation mercredi, et quelque 1500 manifestants s'y trouvaient toujours.