Voilées de la tête aux pieds ou habillées à la dernière mode, les Égyptiennes sont très présentes dans les manifestations place Tahrir au Caire, épicentre de la contestation contre le président Hosni Moubarak.

«Je viens tous les jours» depuis que la place est occupée par les manifestants, affirme la romancière Sahar al-Moggi en agitant un drapeau égyptien.

Après les affrontements meurtriers avec la police la semaine précédente, les manifestations ont pris mercredi un tour violent avec des heurts meurtriers entre les partisans du chef de l'État et ses adversaires, barricadés sur la place.

Mais Mme al-Moggi dit que la peur ne l'a pas empêchée de revenir. «J'avais peur. Mais il était impossible que je reste chez moi», assure-t-elle. «Nous sommes en train de participer à la plus grande révolution de l'histoire d'Égypte», ajoute-t-elle fièrement.

«Il faut qu'hommes et femmes prennent part» aux manifestations, estime Marwa Ibrahim, une jeune femme de 25 ans au chômage malgré un diplôme en microbiologie, en brandissant une pancarte proclamant en anglais: «Le peuple veut le départ de Moubarak».

«Le rôle d'une femme est exactement pareil à celui d'un homme», ajoute-t-elle. «Nous ne voulons pas de Moubarak, nous voulons un changement de régime. Nous avons toujours demandé le changement de la loi d'urgence», poursuit-elle, en référence à l'état d'urgence en vigueur depuis 1981.

Beaucoup de familles ont participé aux manifestations en passant la journée place Tahrir. Vendredi, baptisé «Vendredi du départ», des femmes voilées ont scandé des slogans anti-Moubarak non loin d'un groupe d'hommes et de femmes chantant des chants patriotiques et traditionnels.

Inas, veuve et mère de trois enfants, estime que «toutes les composantes de la société, hommes et femmes, devraient être représentées» au rassemblement.

Après avoir laissé ses enfants chez sa mère pour venir manifester, elle a pris une chambre dans un hôtel à petit budget situé près de la place, rentre chez elle le matin pour faire la cuisine pour sa famille puis se dépêche de regagner la place Tahrir avant le couvre-feu.

Samedi matin, une centaine de femmes ont fait le tour de la place en scandant «Pourquoi avez-vous tué mon fils, pourquoi avez-vous tué notre jeunesse?», alors que les autres manifestants venaient à peine de se réveiller après une nouvelle nuit passée à Tahrir.

Malgré la foule, de nombreuses manifestantes ont noté l'absence d'abus dans les rassemblements. Le harcèlement contre les femmes, qu'elles soient voilées ou non, est pourtant si courant en Égypte que le Centre égyptien pour les droits de la femme (ECWR) l'a qualifié de «cancer social».

«J'en ai souffert par le passé, mais ici, ce phénomène n'existe pas», affirme Marwa. «J'ai l'impression d'être parmi mes frères ici», renchérit Inas, déterminée à continuer de manifester.