L'opposition bahreïnie a annoncé mercredi qu'elle suspendait sa participation au dialogue national avec le pouvoir, au lendemain de l'arrestation d'un de ses chefs, Khalil Marzouk, pour incitation à la violence.

Dans un communiqué, les cinq groupes d'opposition, conduits par la puissante formation chiite Al-Wefaq, précisent avoir «décidé de suspendre (leur) participation au dialogue», engagé en février pour sortir le pays de la crise déclenchée par un mouvement de contestation en 2011.

Justifiant cette décision par «l'obstination du pouvoir dans sa politique répressive», couronnée par l'arrestation de M. Marzouk, ils indiquent que leur décision «serait révisée en fonction des développements politiques».

Dénonçant «un État policier», les groupes d'opposition appellent la communauté internationale à agir face aux «violations croissantes» des droits de l'homme à Bahreïn et préviennent que le régime serait responsable d'un «échec du dialogue national».

Les États-Unis, qui entretiennent à Bahreïn le siège de leur Ve flotte et sont dans l'embarras face à la crise dans ce royaume du Golfe, se sont déclarés «déçus que les groupes d'opposition aient suspendu leur participation au dialogue national».

Le département d'État estime que ce «dialogue national est un pas important (...) vers des réformes significatives pour répondre aux aspirations de tous les Bahreïnis».

Mardi, le parquet de Manama a ordonné la détention pendant 30 jours de Khalil Marzouk, conseiller politique du chef du Wefaq, Ali Salmane, et ancien vice-président du Parlement, en l'accusant «d'incitation et apologie au terrorisme».

L'opposant est accusé de «liens avec le groupe terroriste, le Collectif du 14 février», de «soutien à ce groupe» interdit, et pour avoir prononcé des discours dans des forums ayant «incité à commettre des actes terroristes», le dernier en date remontant au 6 septembre à Saar près de Manama, a indiqué le parquet dans un communiqué.

Al-Wefaq a dénoncé, dans un communiqué, «une escalade dangereuse» en estimant que M. Marzouk avait été pris «en otage par une décision politique du régime». Il a rejeté comme «infondées» les accusations contre M. Marzouk.

Khalil Marzouk figurait parmi les 18 élus d'Al-Wefaq, qui avaient démissionné en février 2011 de la chambre, formée de 40 membres, pour protester contre la répression du mouvement de contestation, déclenché quelques jours auparavant.

En juin 2013, les autorités avaient annoncé avoir démantelé le Collectif du 14 février, un groupe qui anime la contestation sur les réseaux sociaux, et arrêté ses chefs qu'elles accusaient d'être responsables de violences ayant secoué le royaume dirigé par une monarchie sunnite.

Confronté à la persistance de la contestation chiite, le pouvoir a alourdi les peines pour les auteurs de violences et introduit la peine de mort ou la prison à perpétuité en cas de morts ou de blessés.

Le dialogue national, qui a repris le 28 août après une pause estivale de deux mois, peine à progresser depuis son lancement le 10 février avec l'ambition de sortir Bahreïn de l'impasse.

Il avait démarré après l'échec d'une session en juillet 2011, l'opposition s'étant alors retirée des pourparlers deux semaines après leur lancement en s'estimant «sous-représentée et marginalisée».

Mais l'opposition a continué à mobiliser dans la rue tout en dialoguant.

Petit royaume du Golfe dirigé par la monarchie sunnite des Al-Khalifa, Bahreïn est secoué depuis février 2011 par un mouvement de contestation animé par la majorité chiite qui réclame une monarchie constitutionnelle.

Selon la Fédération internationale des droits de l'Homme (FIDH), au moins 80 personnes ont été tuées depuis le début de la contestation.