«Je prie pour qu'on ne revive pas une guerre civile. Malheureusement je ne vois pas comment nous pourrions éviter l'explosion», dit Abed Ali, dont la maison a brûlé dans la nuit lors de heurts à Beyrouth entre Libanais partisans et hostiles au régime de la Syrie voisine.

Cet étudiant de 21 ans habite Tarik el-Jdideh, un quartier à majorité sunnite de Beyrouth-Ouest, où se sont affrontés des partisans du mouvement du Futur, à majorité sunnite et hostile au pouvoir à Damas, et le Parti du courant arabe, une formation également sunnite mais partisane du président syrien Bachar al-Assad.

Deux personnes ont péri dans ces heurts survenus suite à la mort d'un dignitaire sunnite tué dimanche par l'armée dans le Nord.

La mort du cheikh Ahmad Abdel Wahed, connu pour ses critiques à l'égard du régime syrien et son soutien à la révolte, a entraîné un regain de tension dans le pays déjà fragilisé par de récents heurts confessionnels meurtriers et ravivant de douloureux souvenirs au Liban, déchiré de 1975 à 1990 par une guerre civile.

«La guerre civile est la pire chose qui puisse arriver, parce que tu ignores qui est ton ennemi», estime Abed Ali. «Malheureusement, trop de monde au Liban est prêt à une nouvelle guerre ouverte entre communautés armées».

En 2008, des affrontements confessionnels à Beyrouth et dans tout le pays entre des partisans du mouvement du Futur et ceux du puissant Hezbollah chiite, allié de Damas, avaient fait une centaine de morts en une semaine.

Et depuis plus d'un an, la révolte en Syrie exacerbe les tensions au Liban, qui a connu 30 ans d'hégémonie syrienne et est divisé entre adversaires et partisans d'Assad.

Le nord du pays a déjà été secoué par une semaine de heurts confessionnels intermittents dans la grande ville de Tripoli entre sunnites hostiles au régime syrien et alaouites partisans du pouvoir à Damas, qui ont fait 10 morts.

Mais les troubles n'avaient jusqu'ici pas gagné la capitale.

«Les politiques régionales se retrouvent dans ces heurts», explique une femme qui refuse de donner son nom.

Effrayée, elle a décidé de fuir la capitale et d'aller s'installer pour un moment avec sa fille, enceinte, dans sa résidence secondaire en montagne près de Beyrouth.

Le gouvernement libanais est dominé par le Hezbollah et ses alliés, soutiens de Damas, tandis que l'opposition, menée par le chef du mouvement du Futur, Saad Hariri, a accusé le régime de Damas de vouloir semer le chaos au Liban pour détourner l'attention de la crise en Syrie.

«C'est la faute des politiciens, ils agissent comme des voyous, du coup tout le monde les imite et se comporte comme un voyou», estime pour sa part Fadi Abou Elias, 60 ans, un résident chrétien de Beyrouth-Ouest.

Lundi, le calme semblait revenu dans la capitale mais la tension était encore encore palpable.

«Pour que la stabilité revienne au Liban, il faut qu'elle revienne en Syrie, les deux pays sont liés comme un foetus et sa mère», explique Abed Ali. «Mais le régime d'Assad ne va pas tomber comme ça, il va tout faire pour transférer les tensions au Liban», poursuit-il.

Avant de conclure: «J'espère que nous ne tomberons pas dans ce piège».