Des milliers de personnes ont manifesté vendredi à Bahreïn à l'appel de l'opposition pour contester un projet d'union saoudo-bahreïnie, dénoncé par leur chef spirituel l'ayatollah Issa Qassem, selon des témoins.

Défilant sur la route de Boudaiya, reliant plusieurs villages chiites autour de Manama, les manifestants, dont certains étaient drapés des couleurs nationales rouge et blanc, ont scandé des slogans hostiles au projet d'union.

«Non à l'union, Bahreïn n'est pas à vendre», «Le pays n'est pas mis aux enchères», ont répété en choeur les protestataires qui répondaient à un appel de l'opposition, notamment chiite, à une manifestation de masse sous le slogan «Prêts à se sacrifier pour Bahreïn».

Les organisateurs de la manifestation se sont engagés à prévenir «tout débordement» ou tout slogan «portant atteinte» aux autres monarchies du Conseil de coopération du Golfe (CCG), a indiqué le ministère de l'Intérieur sur Twitter.

À la fin de la manifestation, qui s'est déroulée sans incident majeur, l'opposition a souligné «le droit du peuple bahreïni à l'autodétermination».

«Toute décision qui touche à la souveraineté de Bahreïn (...) sans consulter le peuple par voie d'un référendum (...) représentatif sera nulle et non avenue», a ajouté l'opposition dans un communiqué.

Elle accuse les autorités de chercher, par le projet d'union, à «fuir» leurs responsabilités face «à la profonde crise politique et constitutionnelle» que connaît Bahreïn depuis la sanglante répression l'an dernier d'un mouvement de contestation réclamant une monarchie constitutionnelle dans ce petit royaume.

Plus tôt dans la journée, des dizaines de personnes ont manifesté dans plusieurs villages chiites en chantant «Non à l'union» ou «Bahreïn libre, Bouclier de la Péninsule dehors».

Ce Bouclier est une force commune du CCG, dont des unités saoudiennes notamment s'étaient déployées à la mi-mars 2011 à Bahreïn pour épauler la dynastie sunnite qui réprimait un mois de contestation animée par des chiites, majoritaires dans le pays.

Les six monarchies du CCG ont décidé lundi au terme d'un sommet à Riyad de poursuivre l'étude d'un projet d'union, pressenti pour regrouper dans un premier temps l'Arabie saoudite et Bahreïn, et auquel l'opposition chiite bahreïnie, soutenue par l'Iran, est hostile.

L'ayatollah Issa Qassem, intervenant comme imam dans une mosquée à Duraz, à l'ouest de Manama, a réclamé que le projet d'union soit soumis à référendum.

Le peuple «a la liberté de s'opposer ou d'approuver cette union», a-t-il dit.

«Pourquoi vouloir empêcher un peuple d'exprimer sa crainte, son opposition et sa légitime résistance pacifique à un projet qu'on veut lui imposer ?», a poursuivi cheikh Qassem, très écouté dans sa communauté chiite.

Jeudi soir, des affrontements ont opposé forces de sécurité et manifestants sortis dans les rues de plusieurs villages chiites pour protester contre le projet d'union et réclamer la libération d'opposants emprisonnés, selon des témoins.

En Iran, plusieurs milliers de personnes ont manifesté vendredi, à l'appel du pouvoir, contre le projet d'union, qualifié de «complot américano-sioniste» par l'imam lors de la prière à Téhéran.

Le pouvoir iranien avait appelé à manifester dans tout le pays pour dénoncer «le plan américain d'annexion de Bahreïn par l'Arabie saoudite» et «exprimer la colère contre les régimes laquais d'Al-Khalifa et d'Al-Saoud», les dynasties régnantes des deux pays.

«Le destin d'Al-Khalifa et d'Al-Saoud sera le même que celui du Chah, de Moubarak, de Ben Ali et des autres dictateurs», a affirmé le général Mohammad Reza Naqdi, à la tête de la milice Bassidji, cité par l'agence Irna, faisant allusion aux dirigeants renversés dans la région.

«L'Occident ne vous accorde aucune valeur et ils vont se chercher d'autres substituts», a-t-il ajouté.