Un haut responsable du gouvernement révolutionnaire sortant en Libye a sévèrement critiqué le nouveau gouvernement de transition investi jeudi, affirmant qu'il est composé d'une «élite» non représentative soutenue par des puissances étrangères.

Ali Tarhouni, ancien ministre du Pétrole et des Finances, a aussi laissé entendre, lors d'une conférence de presse tard jeudi soir, qu'au moins une de ces puissances étrangères s'ingère de façon excessive dans les affaires internes de la Libye, une apparente référence au Qatar.

M. Tarhouni, ancien professeur d'économie et de finance à l'Université de Washington, était l'une des personnalités les plus visibles et les plus respectées du gouvernement révolutionnaire qui a mené à la chute du régime de Mouammar Kadhafi.

Mais il a affirmé qu'il avait refusé une offre de se joindre au gouvernement de transition du premier ministre Abdurrahim El-Keib, parce qu'il estime que ceux qui sont maintenant au pouvoir ne sont pas représentatifs. Il a accusé le nouveau gouvernement d'être «soutenu de l'extérieur par l'argent, les armes et les relations publiques».

«Les voix que nous entendons maintenant sont les voix de l'élite», a dit M. Tarhouni.

L'ancien ministre, qui a supervisé le système financier libyen dans le gouvernement révolutionnaire, est l'un des premiers hauts responsables libyens à questionner ouvertement la légitimité du gouvernement de transition.

Il a affirmé que les pays qui ont soutenu la rébellion avaient des intérêts en Libye, «dont certains que nous connaissons et d'autres que nous ne connaissons pas». Il n'a pas donné de détails, mais il ne s'est pas opposé quand un journaliste a suggéré qu'il parlait du Qatar.

Le Qatar a été l'un des principaux pays arabes à soutenir l'insurrection contre le régime Kadhafi. Il a fourni des avions pour la campagne militaire de l'OTAN et une aide directe aux révolutionnaires, en fournissant des armes et d'autres équipements.

M. Tarhouni, qui s'est exprimé plusieurs heures après l'investiture du gouvernement de M. El-Keib, s'est dit soulagé de pouvoir maintenant s'exprimer librement.

«Certains pensent imposer leur volonté au peuple libyen et c'est une erreur, a dit Ali Tarhouni. Pour moi, la question de la souveraineté est la plus importante. La révolution visait à rétablir la dignité et la souveraineté.»

Plus tôt cette semaine, le président du Conseil national de transition (CNT) et chef d'État de facto, Mustafa Abdul-Jalil, a aussi laissé entendre que le Qatar s'immisçait dans les affaires libyennes.

Il a dit que les Libyens étaient reconnaissants envers leurs «frères» du Qatar pour avoir soutenu la révolte contre Kadhafi, tout en précisant que le Qatar menait certaines activités en Libye au sujet desquelles le CNT ne savait rien. Il a affirmé que le CNT avait protesté auprès des autorités du Qatar, mais qu'il s'était fait répondre que l'émirat avait le droit de s'immiscer en Libye parce qu'il a «parié sur le succès» de la révolution.