Les rebelles libyens, qui ont nommé des ambassadeurs à Londres et Paris, ont infligé jeudi un nouveau revers au régime de Mouammar Kadhafi en s'emparant de deux localités près de la  frontière tunisienne, au sud-ouest de Tripoli.

Après avoir conquis la ville d'Al-Ghazaya, les insurgés ont poursuivi leur route vers le village d'Om Al-Far, à une dizaine de km au nord-est, qu'ils ont pris en fin d'après-midi, selon un correspondant de l'AFP.

Les combats les plus acharnés ont eu lieu dans la partie orientale d'Al-Ghazaya, que les insurgés ont attaquée vers 8h (3h, heure de Montréal), à la fois par l'ouest et par l'est, a constaté l'AFP.

En milieu d'après-midi, les rebelles ont pénétré à bord de pick-ups dans la cité qu'ils avaient auparavant bombardée à l'artillerie lourde à partir des hauteurs alentour et après la fuite des forces loyales au colonel Kadhafi à bord de nombreux véhicules, a raconté le correspondant de l'AFP.

C'est d'Al-Ghazaya, à une dizaine de km de la frontière avec la Tunisie, que les loyalistes avaient intensifié ces derniers jours leurs tirs de roquettes Grad sur Nalout, localité aux mains des rebelles à 230 km à l'ouest de la capitale libyenne, désormais hors de portée des tirs de l'armée régulière.

Une fois Al-Ghazaya dépassée, les insurgés ont bombardé Om Al-Far, où résident quelques centaines d'habitants, et ont touché un dépôt de munitions, qui a explosé, avant d'y pénétrer, a constaté le correspondant.

Vers 17h30 heure locale (11h, heure de Montréal), les insurgés à pied sillonnaient les rues de la cité pour la sécuriser, tandis que d'autres, en pick-ups, tiraient vers l'extérieur de la ville, où auraient pu se réfugier des soldats fidèles à Mouammar Kadhafi, d'après la même source.

Cette région montagneuse du Nefoussa dans l'Ouest libyen est le théâtre depuis plusieurs mois d'affrontements entre l'armée de Mouammar Kadhafi et la rébellion, qui y a déclenché début juillet une offensive majeure, espérant notamment avancer vers Tripoli.

Les insurgés ont affirmé mercredi avoir fait, sans succès, une offre au colonel Kadhafi de passer la main tout en restant au pays.

Aux termes de cette offre, Mouammar Kadhafi devait abandonner ses fonctions, son lieu de résidence aurait été «le choix du peuple libyen» et il aurait été placé sous «surveillance étroite», a déclaré le chef du Conseil national de transition (CNT) à Benghazi (est), Moustafa Abdeljalil.

Le dirigeant libyen a d'ailleurs défié à nouveau mercredi soir l'OTAN et les insurgés, dans un message sonore adressé à ses partisans à Zalten (à 120 km à l'ouest de Tripoli): «Nous n'avons pas peur. Nous les défions. Nous paierons le prix avec nos vies, nos femmes et nos enfants. Nous sommes prêts au sacrifice pour défaire l'ennemi», a-t-il assuré.

La diplomatie des rebelles

Si la rébellion marque des points sur le terrain, elle gagne également peu à peu en légitimité politique: jeudi, elle a ainsi installé ses «ambassadeurs» en France et en Grande-Bretagne, les deux pays en pointe dans l'opération militaire en Libye.

À Paris, le CNT, organe politique de la rébellion, a nommé Mansour Saif Al-Nasr, 63 ans. Ce Libyen, qui a quitté son pays en 1969, a été membre de la Ligue libyenne des droits de l'homme et du Front national pour le salut de la Libye, mouvement d'opposition en exil.

La France a été le premier pays à reconnaître le CNT et considère désormais que cet organe est «seul titulaire de l'autorité gouvernementale» libyenne.

À Londres, le CNT a par ailleurs choisi Mahmud Nacua, un écrivain et intellectuel de 74 ans, «impliqué dans l'opposition depuis les années 1980», selon Guma Al-Gamaty, coordinateur en Grande-Bretagne pour le CNT.

Cette nomination intervient au lendemain de la reconnaissance par la Grande-Bretagne du CNT en tant que seul «gouvernement légitime» de Libye et après l'expulsion des derniers diplomates loyaux au colonel Kadhafi.

M. Al-Gamaty a qualifié le geste britannique de «pas important» et de «message clair au peuple libyen et à Kadhafi».

La reconnaissance par Londres du CNT a été en revanche jugée «irresponsable» et «illégale» par le vice-ministre libyen des Affaires étrangères Khaled Kaaim.

Le Royaume-Uni a en outre décidé de mettre fin au gel d'actifs pétroliers libyens, d'une valeur de 91 millions de livres (139 millions de dollars). Bloqués dans le cadre d'une résolution des Nations unies, ils seront transférés à la rébellion.