Plus d'un million de Syriens ont manifesté vendredi contre le régime de Bachar al-Assad, principalement à Hama et à Deir Ezzor, mais huit civils ont été tués dans la dispersion de rassemblements, ont annoncé des militants.

Comme chaque vendredi depuis le début de la révolte mi-mars, les Syriens étaient appelés à manifester à la sortie des mosquées, après la prière hebdomadaire. Selon Rami Abdel Rahmane, chef de l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), plus de 1,2 million de personnes ont répondu à l'appel à Hama (centre) et à Deir Ezzor, près de la frontière irakienne.

«À Deir Ezzor, ils étaient plus de 550 000 à la fin de la manifestation, et à Hama, ils étaient plus de 650 000», a-t-il assuré, précisant que les forces de sécurité étaient absentes dans ces deux villes.

La télévision publique syrienne a démenti une telle mobilisation, affirmant que seulement 2000 personnes avaient participé à la manifestation à Deir Ezzor. Les restrictions à la circulation imposées par les autorités syriennes n'ont pas permis à l'AFP de vérifier ces informations de manière indépendante.

Selon M. Abdel Rahmane, les manifestants ont scandé des slogans contre le régime et exprimé leur solidarité avec les villes assiégées par les forces de sécurité, en particulier Homs (centre), théâtre de violences meurtrières depuis une semaine.

Les violences n'ont d'ailleurs pas cessé dans cette ville à laquelle la mobilisation était dédiée ce vendredi. «Deux manifestants ont été tués par les tirs des forces de sécurité qui ont dispersé des manifestations» à Homs, a déclaré Abdel-Karim Rihaoui, chef de la Ligue syrienne des droits de l'Homme.

Plus au nord, «deux manifestants ont été poignardés devant la Mosquée Amné à Alep (nord) par des miliciens fidèles au régime qui ont pénétré dans la mosquée et attaqué» les fidèles, a-t-il ajouté, précisant que des dizaines d'autres manifestants avaient été blessés ou interpellés.

Il y a eu aussi deux morts et plusieurs blessés à Mleiha, dans la province de Damas, un autre mort à Aazaz, dans la province d'Alep, et un manifestant tué dans le village de Kfar Rouma, dans la province d'Idleb (nord-ouest), selon les militants.

Mobilisation dans la capitale

À Damas, où seize manifestants avaient été tués le vendredi précédent par les forces de sécurité, des milliers de militaires ont été déployés tôt vendredi matin, isolant le quartier de Roukn Eddine où vit une importante communauté kurde.

Des milliers de personnes ont cependant manifesté dans la capitale après la prière du vendredi. Ils étaient environ 5000 dans le quartier Midane et des milliers d'autres sont sortis de trois mosquées du quartier Hajar al-Assouad en scandant des slogans réclamant la liberté.

À Douma, une localité à 15 km de Damas où les communications téléphoniques et l'électricité étaient coupées selon un militant, les forces de sécurité quadrillaient le marché et la place de la Grande Mosquée. «Beaucoup d'habitants ont quitté la localité de crainte d'arrestations arbitraires», selon l'OSDH.

Des centaines de manifestants ont défilé dans les localités kurdes du gouvernorat d'Hassaké (nord-est), ainsi qu'à Soueida (sud) et plus de 12 000 personnes ont manifesté à Idleb (nord-ouest), selon des militants.

«Nous ne nous tairons pas sur la servilité, ni sur l'injustice, ni sur le despotisme, quel que soit le prix», ont scandé des jeunes manifestants à Jablé, sur la côte.

À Deraa (sud) où est née la contestation contre le régime du président Bachar al-Assad le 15 mars, des agents de sécurité étaient déployés autour des principales mosquées, mais «des jeunes ont défilé dans la rue al-Koussour et des tirs nourris ont été entendus», a déclaré M. Abdel Rahmane.

À Homs, en dépit des intenses opérations sécuritaires de ces derniers jours, «des milliers de personnes ont défilé dans plusieurs quartiers», a-t-il ajouté.

Hommage à Homs

Dans leurs appels à manifester, les militants de la page Facebook «Syrian Revolution 2011» avaient dédié la journée à Homs, où la répression a fait plusieurs dizaines de victimes civiles cette semaine.

Dans cette ville, la troisième du pays, les forces de sécurité ont abattu deux civils jeudi, tandis qu'au moins 50 autres ont péri entre samedi et mardi, touchés par des tirs de l'armée lors de funérailles ou tués dans des affrontements entre opposants et partisans du pouvoir, selon des militants.

Dans un communiqué, les Comités de coordination de la Révolution syrienne, qui chapeautent les manifestants, ont mis en garde contre les tentatives du régime syrien d'«attiser» le confessionnalisme.

«Le régime criminel au pouvoir en Syrie va continuer de provoquer les dissensions confessionnelles. Il planifie des assassinats et des explosions» contre des communautés particulières (... Il) va continuer d'armer certains habitants de la communauté alaouite (à laquelle appartient M. Assad), en leur faisant croire qu'ils sont menacés», dénonce le communiqué.