La France a renoncé à parachuter des armes aux rebelles libyens, même si ces derniers peinent à progresser sur le terrain, tandis que la Russie et l'Otan ont de nouveau affiché leurs divergences sur l'intervention militaire internationale.

À Paris, le ministre français de la Défense, Gérard Longuet, a affirmé à la presse que les parachutages n'étaient plus «nécessaires». «Ils l'ont été il y a plusieurs semaines de cela, parce que des territoires organisent leur autonomie», a-t-il expliqué.

«Cette autonomie leur permet d'établir des relations avec des partenaires extérieurs, y compris lorsqu'il s'agit de s'équiper en auto-défense», selon lui.

Le ministre français a aussi laissé entrevoir des doutes sur la capacité de la rébellion à mener une grande offensive sur Tripoli, fief de Mouammar Kadhafi.

«Nous ne sommes pas aujourd'hui dans un système stabilisé, centralisé, obéissant dans toutes ses implications sur le terrain à une autorité unique», a-t-il relevé à propos des rebelles, estimant que leur «impatience» devait «être confrontées à un principe de réalité».

Sur le terrain, cinq rebelles ont été tués mardi dans des affrontements avec les forces loyales au dirigeant Mouammar Kadhafi à l'entrée ouest de Misrata, enclave rebelle dans l'Ouest, a-t-on appris auprès des insurgés.

La France a reconnu fin juin avoir livré des armes individuelles aux rebelles dans la région montagneuse du Djebel Nefoussa, au sud de Tripoli. Selon M. Longuet, les parachutages d'armes ont répondu à une «demande formelle» du Conseil national de transition (CNT, organe politique des rebelles) pour des civils qu'il était alors impossible d'approvisionner autrement.

Mais la démarche française a souligné les divergences au sein de la coalition internationale, avec les réserves de son alliée britannique, et renforcé les critiques des opposants à l'intervention armée, en particulier de la Russie.

Une réunion lundi à Sotchi du conseil Russie-Otan n'a d'ailleurs pas permis de régler les différends sur l'intervention militaire internationale en Libye, les responsables russes répétant que les résolutions de l'ONU sur la Libye ne permettaient pas «à n'importe qui de faire n'importe quoi».

«Jusqu'à présent», la résolution a été mise en oeuvre «avec succès», a répondu le secrétaire général de l'Alliance, Anders Fogh Rasmussen, soulignant que la livraison d'armes à la rébellion entrait dans le cadre de la résolution.

Poursuivant sa visite en Russie, M. Rasmussen a évoqué mardi «l'après-Kadhafi», et estimé que l'ONU devrait prendre le relais de l'Otan «pour aider le peuple libyen pendant la période transitoire vers la démocratie» une fois le dirigeant libyen parti.

Dans cette perspective, l'Otan poursuit ses opérations de manière soutenue. Dimanche et lundi, elle a ainsi mené près de 130 frappes au total, touchant principalement des véhicules blindés autour de Tripoli, de Misrata et surtout de Brega, près du front Est.

Parallèlement, les initiatives diplomatiques se poursuivaient. Le ministre turc des Affaires étrangères, Ahmet Davutoglu, qui s'est rendu dimanche à Benghazi pour reconnaître le CNT comme «le représentant légitime du peuple libyen», devait recevoir mardi à Ankara des représentants de l'ONU, de la rébellion libyenne et du groupe de contact sur la Libye.

La Turquie, qui a durci le ton à l'égard du régime de Tripoli ces derniers jours, doit accueillir le 15 juillet à Istanbul la prochaine réunion de ce groupe de contact.

Et le régime libyen a assuré lundi soir que des contacts étaient en cours entre des représentants de Tripoli et de Benghazi dans plusieurs capitales arabes et européennes, en particulier à Rome.

La semaine dernière, l'Union africaine (UA) a proposé des négociations de sortie de crise écartant le colonel Kadhafi des discussions mais pas explicitement du pouvoir, une éventualité rejetée par les rebelles.

Accueillant à Londres le président de la commission de l'UA, le Gabonais Jean Ping, le ministre britannique des Affaires étrangères, William Hague, a salué le «rôle important» de l'Union africaine pour résoudre la crise.

M. Longuet a pour sa part estimé que toutes les tentatives de médiation étaient «les bienvenues». «Si les diplomates m'apportent des solutions, je serai le plus heureux des hommes», a-t-il insisté, rappelant que cette interminable campagne libyenne coûtait à la France environ «un million d'euros par jour».