Des Syriens ont crié leur colère samedi contre le régime du président Bachar al-Assad dans un des camps de réfugiés établis à la frontière turque où, pour la première fois, journalistes et photographes ont été autorisés à pénétrer.

Une cinquantaine d'hommes ont organisé une mini-manifestation à l'arrivée des journalistes au camp de Boynuyogun, dans la province frontalière d'Hatay (sud), pour une brève visite encadrée par des responsables turcs.

«Les gens veulent la fin de ce régime !» et «Menteurs, menteurs, les médias syriens mentent !» criaient en arabe les manifestants.

D'autres reprenaient en anglais le slogan «Merci, merci Erdogan» rendant hommage au Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan, qui a déclaré qu'il ne fermerait pas les frontières de son pays aux réfugiés syriens.

Un homme montrait la jambe bandée d'une femme âgée: «Ils lui ont tiré dans la jambe. Ils l'ont battue à la tête et dans le dos !», criait-il.

Assis à l'intérieur d'une tente, un couple avec un bébé de cinq mois a expliqué qu'il avait atteint la Turquie après avoir passé quatre nuits sous une pluie battante, de l'autre côté de la frontière.

«J'ai un diplôme universitaire, mais cela fait trois ans que je ramasse les ordures en Syrie», a affirmé un homme d'une cinquantaine d'années.

D'autres réfugiés ont vivement critiqué la Chine et la Russie, qui s'opposent à toute ingérence étrangère en Syrie. «Que la Chine et la Russie aillent au diable! Elles nous envoient au massacre», a dit l'un d'eux.

Selon le dernier bilan des arrivées en Turquie, plus de 10 000 réfugiés syriens sont maintenant hébergés dans différents camps du sud du pays.

Dans une pièce réservée à la télévision, une cinquantaine de personnes regardaient les dernières nouvelles sur leur pays diffusées par une chaîne satellitaire en arabe, au moment de cette visite offerte à la presse, la première depuis l'installation des camps.

Des responsables turcs ont escorté des réfugiés sur un terrain à l'entrée du camp pour parler à la presse, mais sont souvent intervenus dans les échanges quand les journalistes ont commencé à poser des questions.

«Ils nous protègent ici», a dit, par l'intermédiaire d'une interprète, une vieille femme voilée.

Un homme d'une vingtaine d'années a renchéri : «Ils nous traitent bien. Nous sommes derrière des barrières parce que l'État syrien a peut-être envoyé des gens pour obtenir des informations».

Un dissident syrien installé en Turquie a pour sa part affirmé vendredi à l'AFP que des réfugiés du camp proche de Yayladagi observaient une grève de la faim pour protester contre l'isolement auquel les soumettent les autorités turques.

«Les réfugiés ont entamé une grève de la faim après la prière du vendredi», a déclaré cette source, qui a souhaité conserver l'anonymat.

L'armée syrienne, appuyée par des chars, est intervenue samedi dans le village de Bdama, étendant ses opérations de ratissage dans le gouvernorat d'Idleb (nord-ouest), selon un défenseur des droits de l'Homme.

Le village, tout proche de la frontière turque, est situé à quelques kilomètres au nord de la ville de Jisr al-Choughour meurtrie par la répression et désertée par ses habitants qui ont fui en Turquie après l'intervention de l'armée dans la localité la semaine dernière.