Au poste frontière de Dehiba, dans le sud de la Tunisie, le flot de réfugiés libyens ne tarissait pas dimanche matin, la police tunisienne ayant même enregistré le chiffre record de 4970 personnes pour la seule journée de samedi.

Ce flux de réfugiés a augmenté notablement à partir de midi en raison de combats qui ont opposé rebelles libyens et forces kadhafistes qui ont tiré des dizaines d'obus et des salves de roquettes de type Grad. Quatre obus ont d'ailleurs atteint le sol tunisien sans faire de victimes entre le poste frontière et la ville de Dehiba à 4 km de là.

En milieu de matinée, des dizaines de véhicules aux plaques d'immatriculation libyennes patientaient au poste frontière de Dehiba, l'un des principaux points de passage entre les deux pays avec celui de Ras Djir à 200 km au nord. La route qui mène à Zenten (ouest de la Libye) est un axe logistique important pour les deux parties libyennes qui s'en disputent le contrôle.

Côté libyen, un des soldats rebelles qui tient le poste, surmonté du drapeau révolutionnaire aux trois couleurs rouge noire et verte, relève sur un grand cahier le nom de chaque personne qui quitte le pays. La guerre n'est pas loin. Selon des rebelles, des combats les ont opposés aux forces kadhafistes dans la nuit de samedi à dimanche à 7 kilomètres de là dans la montagne.

Jeudi, des soldats de l'armée régulière avaient mené un violent raid contre les rebelles sur le poste frontière, suscitant une vive protestation de Tunis.

Depuis, l'armée tunisienne s'est déployée à quelques centaines de mètres de la frontière en installant des postes de combat à l'abri de murets de pierres sèches improvisés disséminés dans un paysage minéral.

Malgré l'attaque de jeudi, la vingtaine de rebelles armés de fusils d'assaut kalachnikov et appuyée par un seul pick-up portant un canon bi-tube de 20 mm ne semble pas inquiète. «Ce n'est pas la peine d'être trop nombreux ici, confie l'un d'eux à l'AFP, il vaut mieux s'opposer à eux plus loin chez nous».

Une fois passé le contrôle sommaire des rebelles, les réfugiés sont pris en charge par la police tunisienne. Dans les breaks ou les voitures surchargées où s'entassent souvent des familles d'une dizaine de personnes, chacun attend patiemment le contrôle des papiers que le père de famille présente aux policiers.

Une dizaine de minutes plus tard, les véhicules avancent de quelques mètres vers les douaniers. La plupart du temps, ceux-ci jettent un coup d'oeil sur les valises et les paquets et font signe de passer. De temps à autre, un chien de l'armée vient flairer l'intérieur d'une voiture à la recherche d'armes ou de munitions.

Quelques mètres plus loin, des membres de la Protection civile tunisienne  attendent les blessés du conflit. Ils peuvent leur donner les premiers soins sur place avant de les évacuer vers les hôpitaux de Dehiba à 4 km de là et de Tataouine à 130 km, pour les plus touchés, explique un sous-officier.

Dimanche en fin d'après-midi, un combattant rebelle touché très grièvement à la tête par un éclat d'obus a été évacué sur Tatatouine, comme ont pu le constater des journalistes.

Quant aux réfugiés sans ressources et sans logement, ils sont accueillis dans le tout premier camp de réfugiés après la frontière, installé dans la ville de Dehiba à 4 km de là. 1277 réfugiés y étaient recensés dimanche matin, selon ce sous-officier de la Protection civile. Deux autres camps sont installés sur la route vers le nord à Remada et à Tataouine.