L'opposition a rendu jeudi le pouvoir yéménite responsable d'un «massacre sauvage», au lendemain de la mort de 13 manifestants à Sanaa, affirmant que le régime cherchait à torpiller la prochaine signature d'un accord de sortie de crise.

Un adolescent de 15 ans a succombé jeudi à ses blessures, portant à 13 le nombre de protestataires tués par des tirs des forces gouvernementales mercredi soir dans une manifestation à Sanaa.

Les manifestations réclamant le départ du président Saleh, au pouvoir depuis 32 ans, durent depuis fin janvier et ont fait plus de 145 morts, selon des chiffres compilés par l'AFP à partir de bilans d'organisations de défense des droits de l'Homme et de témoins.

Les monarchies arabes du Golfe ont élaboré un plan de sortie de crise et ont convié le pouvoir et l'opposition à sa signature à Ryad.

L'accord pourrait être signé en marge d'une réunion dimanche dans la capitale saoudienne des ministres des Affaires étrangères du Conseil de Coopération du Golfe (CCG), selon un responsable du groupement régional.

Si l'accord est signé, ce sera la première fois qu'une issue négociée est trouvée à l'une des nombreuses révoltes qui secouent le monde arabe depuis le début de l'année.

Mais alors que le parti au pouvoir et le Forum commun (opposition) ont annoncé avoir accepté le plan du CCG, les forces de sécurité et des militaires ont tiré à balles réelles mercredi soir pour disperser une manifestation à Sanaa, alors que des partisans du régime attaquaient les protestataires à coups de pierres et de bâtons, selon des témoins.

Plus de 205 personnes ont été blessées, dont 25 grièvement, selon un bilan de sources médicales.

Les manifestants dénonçaient le plan du CCG, en raison d'une clause accordant l'immunité au président Ali Abdallah Saleh.

Amnesty International a également estimé que le président Saleh devrait être tenu pour responsable des violations des droits de l'Homme.

«L'immunité ne doit pas être accordée au président yéménite et à ses alliés politiques, en contrepartie d'une issue à la crise», a estimé l'organisation dans un communiqué.

Pour sa part, le Forum commun a dénoncé le «massacre sauvage» qui «démontre que le régime est déterminé à poursuivre l'effusion de sang pour mettre en échec l'accord (de sortie de crise) et se dérober à son acceptation» de cette initiative.

Dans un communiqué, il a appelé les pays du CCG à «protéger les manifestants pacifiques» et ne pas «apporter de couverture aux tueries du régime», faute de quoi «il sera difficile au Forum commun d'aller de l'avant dans la signature de l'accord».

Les États-Unis, qui ont accompagné la médiation du Golfe, ont appelé les Yéménites à la retenue, les exhortant à éviter «dans les prochains jours» tout ce qui pourrait compromettre la conclusion de l'accord sur une transition du pouvoir, dans un communiqué de leur ambassade à Sanaa.

L'accord prévoit la formation par l'opposition d'un gouvernement de réconciliation nationale, et un mois plus tard la démission, avec une garantie d'immunité, du président Saleh.

Une élection présidentielle devrait ensuite avoir lieu dans les 60 jours.

Les jeunes qui campent depuis le 21 février sur la «place du Changement» à Sanaa ont proclamé leur refus de l'accord.

«La mort de manifestants mercredi ne fera que renforcer la détermination des jeunes à réclamer la chute du régime et la traduction en justice de tous ceux qui sont impliqués dans ces crimes», a déclaré à l'AFP Wassim al-Qirchi, le coordinateur des protestataires à Sanaa.

Les deux parties se préparaient à masser vendredi, comme à l'accoutumée depuis le début de la crise, leurs partisans, le camp du président Saleh ayant baptisé vendredi «journée de la légitimité constitutionnelle», et les protestataires «journée de la fidélité aux martyrs».