Au moins six personnes ont été tuées mardi par des tirs des forces de sécurité à Deraa, épicentre de la contestation dans le sud de la Syrie, a déclaré un militant sur place.

Selon ce militant des droits de l'homme, Abdallah Abazid, «au moins 6 martyrs sont tombés mardi par les tirs des forces de sécurité et de l'unité 4 de l'armée» contre les quartiers.

Le militant affirme posséder une liste nominative des personnes tuées, parmi lesquelles figure un imam.

Il a indiqué par ailleurs que «des tirs de balles intensifs étaient entendus» dans la nuit de mardi à mercredi à Deraa.

L'armée syrienne a envoyé mardi des renforts dans cette ville et a tiré sur les habitants, selon le militant.

Lundi, au moins 25 personnes avaient été tuées dans le pilonnage intensif de Deraa où les forces de sécurité avaient pénétré avant l'aube, appuyées par des chars et des blindés, ont indiqué des militants des droits de l'homme. Ils étaient intervenus pour mater la contestation contre le régime, selon les militants.

Mais selon les autorités syriennes, qui accusent depuis le début de la contestation «des gangs criminels armés» d'être à l'origine du mouvement, l'armée est entrée à Deraa «à l'appel des habitants» pour en finir avec «les groupes terroristes extrémistes».

Le régime du président Bachar el-Assad semble avoir opté pour la solution militaire afin d'écraser le mouvement de contestation sans précédent qui secoue le pays depuis six semaines.

Ban Ki-moon s'inquiète, le Conseil de sécurité divisé

Le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, a fait part mardi de son «inquiétude croissante» concernant la répression sanglante menée contre les manifestants en Syrie, en particulier l'utilisation de chars et de tirs à balles réelles par les forces de sécurité.

«Nous regardons ce qui se passe de très près, et avec une inquiétude croissante», a déclaré M. Ban à la presse à l'issue de discussions du Conseil de sécurité consacrées à la Syrie.

«Je condamne absolument la violence contre les manifestants pacifiques, en particulier l'utilisation de chars et de balles réelles qui ont blessé ou tué des centaines de personnes», a-t-il dit.

«Il va sans dire que les autorités syriennes ont pour obligation de protéger les civils et de respecter les règles internationales en matière de droits de l'homme», a-t-il ajouté.

M. Ban a apporté son soutien à l'appel de la Haut commissaire de l'ONU pour les droits de l'homme, Navi Pillay, en faveur d'une enquête indépendante et transparente sur les centaines de morts intervenues en Syrie.

Les discussions du Conseil de sécurité mardi sur la Syrie n'ont pas réussi à entrer dans une phase formelle au sujet d'un projet de déclaration condamnant les violences, proposé par quatre pays européens: la France, l'Allemagne, la Grande-Bretagne et le Portugal.

Le Conseil devait se réunir à nouveau mercredi, mais la Russie constituait le principal obstacle à l'adoption de cette déclaration, qui soutient également l'appel à une enquête.

Selon l'opposition, au moins 400 personnes sont mortes depuis le 15 mars, victimes des tirs à balles réelles et des gaz lacrymogènes des forces de sécurité, dont 25 pour la seule journée de lundi dans la ville de Deraa.

La Grande-Bretagne et la France ont appelé à une action «forte» contre la violence utilisée par les forces du président syrien Bachar el-Assad et qui a fait des centaines de morts ces dernières semaines.

Les États-Unis ont annoncé que pour le moment, ils entendaient s'en tenir à une réponse diplomatique et à d'éventuelles sanctions.

M. Ban s'est également exprimé sur le Yémen, appelant «à nouveau à l'arrêt immédiat des violences contre les manifestants pacifiques».

«Les problèmes du Yémen peuvent être résolus uniquement par un dialogue large et pacifique», a-t-il dit. «J'espère que les négociations entre le gouvernement et les autres parties se traduiront par un accord acceptable par tous».

Même si le Conseil de sécurité n'a pas été capable de se mettre d'accord jusqu'ici ne serait-ce que sur une déclaration concernant tant la Syrie que le Yémen, M. Ban a loué son rôle en Libye, où il a donné le feu vert à une zone d'exclusion aérienne et à des sanctions contre le régime de Mouammar Kadhafi.

«Il est clair que l'action unie et décisive du Conseil de sécurité a sauvé de nombreuses vies», a-t-il relevé. «Il est clair également que le régime libyen a perdu à la fois toute légitimité et toute crédibilité, en particulier concernant la protection de son peuple et la réponse à son aspiration légitime au changement».

Dans ce pays, a cependant averti M. Ban, la crise humanitaire est «de plus en plus pressante».

Il a ajouté que l'ONU espérait toujours pouvoir obtenir un cessez-le-feu, et annoncé que son émissaire Abdul Ilah al-Khatib se rendrait à nouveau vendredi à Benghazi, bastion de la rébellion.