Trois Yéménites manifestant contre le régime du président Ali Abdallah Saleh ont été tués mardi avant une rencontre de représentants du pouvoir avec des médiateurs du Golfe et une réunion du Conseil de sécurité sur la crise politique dans ce pays.

La police est intervenue en début de soirée pour empêcher par la force une marche dans l'ouest de la capitale mais a été obligée de battre en retraite.

«Un deuxième manifestant blessé est décédé et on a 30 blessés par balles, 30 blessés par des objets contondants et des pierres et des centaines par de puissants gaz lacrymogènes», a déclaré à l'AFP un médecin soignant les contestataires à Sanaa, Faker Kabati.

L'un de ses confrères avait annoncé peu auparavant la mort d'un premier manifestant et indiqué que les blessés se comptaient par centaines.

Les autorités ont quant à elles fait état de «plusieurs blessés» dans les rangs de la police et accusé les manifestants d'avoir enlevé une «dizaine d'officiers et d'agents» pendant les heurts.

Dans la matinée, une personne a été tuée et plusieurs blessées par les forces de sécurité qui ont tiré sur des milliers de manifestants hostiles au régime à Taëz (sud-ouest), selon des témoins et une source médicale.

Selon des manifestants, des hommes armés en civils ont été vus en train de tirer en l'air ou en direction des manifestants qui les accusent d'être des hommes de main du régime du président Saleh.

Une autre manifestation de soutien au régime a eu lieu sans incident à Sanaa, pendant laquelle les partisans de M. Saleh ont lancé des slogans favorables à «la légitimité constitutionnelle».

À Taëz, dans le sud-ouest du Yémen, des milliers de manifestants ont assiégé en soirée les bureaux de la Brigade criminelle pour protester contre la mort du manifestant tué dans la matinée, et exiger la libération de personnes arrêtées dans la foulée de cet incident meurtrier, ont rapporté des habitants.

D'autres manifestations ont eu lieu à Ibb, Aden, Chabwa, dans le sud et le sud-est ainsi qu'à Hodeïda (ouest), Damar (centre) et Saada, dans le nord, selon les protestataires, alors que des contre-manifestations se sont déroulées à Damar et Marib (centre), selon les autorités.

L'intensification de la contestation intervient avant une réunion dans la soirée à Abou Dhabi des ministres des Affaires étrangères du Conseil de Coopération du Golfe (CCG) -Arabie saoudite, Émirats arabes unis, Oman, Qatar, Koweït, Bahreïn- avec des représentants de M. Saleh, au pouvoir depuis 32 ans.

Le CGG, qui cherche une solution à la crise yéménite, a déjà rencontré dimanche des opposants qui ont exigé un départ immédiat de M. Saleh.

Le Conseil de sécurité des Nations unies devait tenir pour sa part en soirée, à l'initiative de l'Allemagne, sa première réunion sur le Yémen.

Le conseil a mis le Yémen à son agenda pour la première fois, soulignant ainsi l'inquiétude internationale à propos des soulèvements dans le monde arabe.

«Le fait que le Conseil se réunisse aujourd'hui sur le Yémen envoie un signal fort à la communauté internationale: les négociations ne doivent pas s'enliser et toute nouvelle effusion de sang doit être évitée», a déclaré l'ambassadeur allemand à l'Onu Peter Wittig, alors que la contestation violente du régime a fait près de 130 morts depuis qu'elle a commencé fin janvier.

«Il est grand temps que toutes les parties, spécialement le président Saleh (...) s'efforcent d'accomplir une transition pacifique», a ajouté M. Wittig, en saluant «la médiation» du CCG.

Le Fonds mondial pour l'enfance (Unicef) s'est inquiété des retombés du conflit sur les enfants en indiquant qu'au moins 26 d'entre eux ont trouvé la mort au Yémen ces deux derniers mois.