Le président yéménite Ali Abdallah Saleh a défendu vendredi sa légitimité de chef d'État élu, alors que des responsables religieux et tribaux se sont joints aux protestataires pour réclamer son départ «immédiat».

«Ces masses populaires, ces millions de personnes rassemblées sur cette place sont venues dire oui à la légitimité constitutionnelle», a déclaré M. Saleh à l'adresse de ses partisans massés sur la place Sabiine, jouxtant son palais à Sanaa.

Au pouvoir depuis 32 ans, M. Saleh, dont le mandat court jusqu'en 2013, semble ainsi rejeter les appels à son départ lancés par ses détracteurs.

«Ces masses sont celles (des élections) de 2006 qui ont dit oui à Ali Abdallah Saleh comme président de la République», a-t-il rappelé sous les ovations de dizaines de milliers de partisans.

«C'est un message clair adressé à l'intérieur et à l'extérieur du pays. C'est un référendum populaire sur (ma) légitimité constitutionnelle», a-t-il encore dit.

Ses partisans ont lancé ces dernières semaines des contre-manifestations, réunissant chaque vendredi de nombreux Yéménites favorables au maintien de M. Saleh.

Partisans et adversaires s'étaient rassemblés massivement à Sanaa pour une nouvelle journée de mobilisation, placée sous le slogan «du dialogue» par les premiers et celui «de la détermination» par les seconds.

Les forces de sécurité se sont déployées en force dans la capitale où elles ont procédé à des fouilles systématiques des manifestants se rendant sur les lieux de rassemblement des partisans de M. Saleh: les places Tahrir et Sabiine.

Pour leur part, les militaires, ralliés à la contestation, ont contrôlé minutieusement les accès de la place du Changement, près de l'université de Sanaa, où les jeunes protestataires campent depuis le 21 février pour exiger le départ du chef de l'État.

«Détermination jusqu'à la victoire», «Ni dialogue, ni négociations. Notre revendication est claire: le départ de Saleh», lisait-on sur des pancartes brandies par les protestataires sur la place du Changement.

«Par nos âmes, par notre sang, nous nous sacrifions pour Ali Abdallah Saleh», ont répliqué des partisans du chef de l'État, arborant ses portraits et des banderoles stigmatisant «le chaos» et appelant au «dialogue».

Des rassemblements similaires ont eu lieu dans d'autres villes du Yémen, notamment à Taëz, au sud de Sanaa, où huit protestataires ont été blessés par des tirs de partisans du régime, selon des témoins.

Des dizaines de milliers de manifestants ont défilé également dans les rues des principales villes du Sud, notamment à Aden, pour réclamer la chute du régime.

D'influents dignitaires religieux et chefs tribaux yéménites ont appelé au départ «immédiat» de M. Saleh, l'avertissant que s'il ne se démettait pas «rapidement», ils «prendraient la tête des manifestations et des sit-in» dans le pays.

Dans un communiqué publié vendredi, au lendemain d'une réunion à Sanaa, ils ont annoncé «rejeter toute initiative ne prévoyant pas (...) au préalable le départ du président» Saleh, dans une référence implicite à une initiative des voisins arabes du Yémen.

Les six monarchies arabes du Golfe ont présenté un plan de sortie de crise prévoyant que le président transfère ses prérogatives à son vice-président, et préconisant la formation d'un gouvernement d'union nationale dirigé par l'opposition pour élaborer une Constitution et organiser des élections.

M. Saleh s'est toujours dit prêt à céder le pouvoir dans le cadre d'un processus ordonné et dans le respect de la Constitution.

Par ailleurs, Human Rights Watch (HRW) a dénoncé la présence d'enfants-soldats dans les rangs de la division du général Ali Mohsen al-Ahmar, qui a rallié le 21 mars la contestation et défend les manifestants hostiles au régime.