L'OTAN a pris jeudi les opérations libyennes en main, avertissant les forces du colonel Mouammar Kadhafi qu'elles seraient «mal avisées» de continuer à frapper des civils.

«À vous qui agissez contre la population civile et les centres urbains, vous seriez bien mal avisés de continuer, et je vous recommande de cesser», a lancé le commandant de l'opération «Protecteur unifié», le général canadien Charles Bouchard.

Il donnait sa première conférence de presse de son QG de Naples (sud de l'Italie), au moment où l'Otan venait de prendre le relais de la coalition multinationale dont l'intervention a été coordonnée pendant 12 jours par les États-Unis.

«Jeudi matin à 6H00 GMT, l'OTAN a pris les commandes des opérations aériennes internationales en Libye», a annoncé le secrétaire général de l'Otan, Anders Fogh Rasmussen.

«L'alliance a tous les moyens en place pour remplir ses missions sous le chapeau de l'opération Protecteur unifié : l'embargo sur les armes, la zone d'exclusion aérienne, et les actions destinées à protéger les civils et les centres urbains», a-t-il affirmé.

L'OTAN a donc désormais la responsabilité des frappes en Libye jusque-là assumée par la coalition emmenée par les États-Unis, la France et la Grande-Bretagne.

Quelque 20 des 28 pays de l'Otan contribuent à l'opération, selon le président du Comité militaire réunissant les chefs d'état-major de l'alliance, l'amiral Paolo Di Paola.

D'après le général Bouchard, une centaine d'avions et une douzaine de navires ont été placés sous ses ordres.

«L'OTAN se concentre sur la protection des civils et des zones d'habitat civil contre des attaques», a souligné M. Rasmussen, en s'appuyant sur la résolution 1973 des Nations unies.

La Belgique, la France, le Canada, le Danemark, la Grande-Bretagne, l'Italie, la Norvège et les États-Unis estiment que cette résolution leur donne le droit de continuer à cibler les forces libyennes qui menaceraient les populations.

Des pays, comme les Pays-Bas et l'Espagne, n'ont en revanche pas donné à leurs avions l'autorisation de prendre part à des frappes. Certains comme la Turquie et la Roumanie ne participeront qu'à des forces navales.

D'autres enfin, notamment l'Allemagne et de petits pays alliés, sont totalement absents, même s'ils contribuent aux états-majors permanents de l'Otan qui encadrent «Protecteur unifié».

L'OTAN avait commencé la veille à assumer le contrôle partiel des opérations.

Ce qui a conduit le général Bouchard à annoncer l'ouverture d'une enquête pour vérifier que l'alliance n'avait pas été impliquée dès mercredi dans des raids qui auraient pu faire des victimes civiles, à la suite d'informations de presse.

«Nos règles d'engagement sont très strictes», a-t-il affirmé.

Le transfert à l'Otan devrait permettre aux États-Unis de se mettre en retrait, conformément aux voeux du président Barack Obama, soucieux de ne pas trop impliquer son pays dans une autre expédition militaire coûteuse et lointaine, l'Afghanistan réclamant déjà toute son attention et l'Irak n'étant pas stabilisé.

Les Européens pourront cependant compter sur les Américains pour leur fournir «à la demande» des moyens -notamment en matière de renseignement et de brouillage- qui leur manquent, a expliqué un diplomate.

«Les États-Unis continueront de fournir à l'Otan leurs moyens, qui sont uniques», a assuré l'amiral Di Paola.

Interrogé sur la présence d'hommes des forces spéciales britanniques et américaines sur le sol libyen rapportée par des médias londoniens et new-yorkais, il s'est refusé à faire des commentaires. Toutefois, a-t-il dit, l'Otan prendra les renseignements que lui communiqueront les alliés «d'où qu'ils viennent».