La coalition internationale a assuré dimanche avoir sévèrement endommagé les défenses antiaériennes libyennes et se préparait à attaquer à partir de lundi les lignes de ravitaillement des forces du régime de Mouammar Kadhafi.

La première phase de frappes aériennes est «un succès» et a permis d'instaurer une zone d'exclusion aérienne, a déclaré le plus haut gradé américain, l'amiral Michael Mullen, selon qui les pro-Kadhafi n'avancent plus vers le fief des insurgés, Benghazi (1000 km à l'est de Tripoli).

A l'ouest de Benghazi, des véhicules des forces de Kadhafi ont été bombardés à l'aube.

Des «systèmes clés de la défense antiaérienne et des sites de missiles SAM près de Tripoli, de Misrata, et de Syrte» ont également été attaqués, selon le commandement militaire américain.

Un sous-marin britannique a notamment tiré des missiles de croisière  Tomahawk dans le cadre d'«un raid coordonné contre les systèmes libyens de défense anti-aérienne», selon le ministère britannique de la Défense à Londres.

«Les frappes ont été très efficaces et ont fortement endommagé les défenses antiaériennes du régime», selon le vice-amiral américain Bill Gortney.

La coalition, avec à sa tête les Etats-Unis, la France et la Grande-Bretagne, est entrée en action samedi en bombardant par air et par mer des objectifs militaires, en vertu de la résolution 1973 de l'ONU adoptée jeudi soir.

Après la première vague de frappes contre les défenses antiaériennes et des blindés près des lignes des insurgés, la prochaine étape consistera, selon l'amiral Mullen, à attaquer les lignes de ravitaillement des pro-Kadhafi pour limiter leur capacité à se battre.

«Ses forces sont plutôt éparpillées entre Tripoli et Benghazi et nous allons essayer de couper le soutien logistique à partir de demain» lundi, a précisé l'amiral.

Après s'être engagé à un cessez-le-feu vendredi, qui n'avait pas été respecté, le régime libyen a renouvelé cette annonce dimanche soir assurant l'appliquer dès 14h00, en réponse à l'appel samedi de l'Union africaine à «la cessation immédiate des hostilités», selon un porte-parole de l'armée.

Ce cessez-le-feu est «un mensonge», ou a été «immédiatement violé» par les forces libyennes, a réagi le conseiller du président Barack Obama pour la sécurité nationale, Tom Donilon. Il a par ailleurs jugé que les situations en Libye et à Bahreïn n'étaient «pas comparables» pour justifier la différence de réaction américaine à la répression des révoltes populaires dans ces deux pays.

Dimanche soir, de violentes explosions ont secoué Tripoli, dont l'une dans le secteur de la résidence du colonel Kadhafi d'où s'élevait une colonne de fumée, selon des journalistes de l'AFP.

Un bâtiment administratif du complexe résidentiel du colonel à Bab el-Aziziya, à Tripoli, a été totalement détruit par un missile, a constaté un journaliste de l'AFP.

«Nous sommes les victorieux, vous êtes les vaincus. Nous ne nous replierons pas du champ de bataille», avait proclamé dans la matinée le dirigeant libyen, au pouvoir depuis près de 42 ans et contesté depuis le 15 février par une révolte qui s'est transformée en guerre civile.

«Nous allons vous combattre. Nous ne vous laisserons pas notre terre», a poursuivi le colonel Kadhafi, prévoyant une «longue guerre».

Interrogé sur les menaces proférées la veille par son père qui avait juré de s'attaquer à «tout objectif civil ou militaire» en Méditerranée, un de ses fils, Seïf Al-Islam, a cependant exclu dimanche d'abattre des avions civils en Méditerranée.

Le secrétaire américain à la défense Robert Gates s'est lui prononcé contre une frappe ciblant directement Mouammar Kadhafi.

Les opérations n'ont pas pour objectif de «chasser Kadhafi du pouvoir» mais de «protéger les civils», a rappelé de son côté l'amiral Mullen.

M. Gates a également affirmé que Washington ne jouerait pas «de rôle dominant» dans l'intervention, d'autres pays étant amenés à prendre les devants «dans les prochains jours».

«Nous aurons un rôle militaire dans la coalition, mais pas un rôle dominant», a-t-il insisté en relevant que les pays arabes étaient hostiles à l'idée de passer sous le drapeau de l'OTAN.

L'Italie, la Belgique et l'Espagne ont annoncé leur participation à l'opération, tout comme le Qatar et les Émirats.

L'intervention militaire était souhaitée par l'opposition libyenne, surtout depuis la reprise ces derniers jours par les forces loyalistes de plusieurs villes sous contrôle des rebelles. Elle a débuté par une frappe aérienne française samedi à 12h45.

Le chef de la Ligue arabe Amr Moussa a critiqué les bombardements estimant qu'ils s'écartaient «du but qui est d'imposer une zone d'exclusion aérienne».

La Turquie a demandé aux autres pays de l'Otan de revoir les plans d'une éventuelle intervention de l'alliance en Libye, jugeant que les bombardements de la coalition avaient changé la donne et qu'il fallait épargner les civils.

Le Pentagone a affirmé dimanche soir qu'il n'y avait «pas d'indication» de victimes civiles dans les zones visées par des frappes aériennes.

La résolution 1973 exige l'arrêt complet des attaques contre des civils, impose une zone d'exclusion aérienne en Libye et permet des frappes pour contraindre les pro-Kadhafi à cesser la répression qui a fait des centaines de morts et poussé 300 000 personnes à fuir le pays.

Alors que l'opération militaire semblait imminente samedi, les forces de M. Kadhafi avaient attaqué Benghazi. Plus de 90 personnes ont été tuées, selon des sources hospitalières.