Le président yéménite Ali Abdallah Saleh a offert jeudi d'abandonner ses pouvoirs exécutifs avant la fin de l'année mais cette nouvelle concession a été rejetée par l'opposition qui exige son départ.

Le président, au pouvoir depuis 32 ans dans ce pays pauvre de la péninsule arabique, est la cible d'une contestation populaire depuis la fin janvier qui a déjà fait une trentaine de tués.

Des violences cette semaine ont fait au moins trois morts, et Washington s'est dit mercredi «profondément préoccupé», appelant «les forces de sécurité, tout comme les manifestants, à montrer de la retenue».

Dans un discours jeudi à Sanaa devant des milliers de ses partisans, le président devenu un allié important des États-Unis dans la lutte contre Al-Qaïda a proposé la formation d'un gouvernement fort mais soumis au Parlement.

Il a proposé la rédaction d'une nouvelle Constitution qui devrait être approuvée par referendum d'ici fin 2011 et établirait une division claire des pouvoirs exécutifs et législatifs.

Selon lui, cette Constitution viserait à «instaurer un régime parlementaire, donnant tous les pouvoirs exécutifs à un gouvernement élu par le Parlement fin 2011 ou début 2012», dans ce pays de 24 millions d'habitants.

Le président, qui a vu ses appuis politiques dans les tribus et au sein de son propre parti se réduire, a assuré qu'il voulait éviter «la sédition», alors que son autorité est remise en cause à Sanaa et dans le reste du pays par des manifestations quotidiennes.

Le Yémen est un pays très traditionnel où les clans jouent un rôle majeur et dont l'unité réalisée en 1990 avec la réunion du nord tribal et du sud marxiste est encore fragile. Il occupe une position stratégique dans le sud de la péninsule arabique, entre la Mer Rouge et l'Océan Indien.

L'opposition parlementaire a immédiatement rejeté l'initiative du président Saleh. «Elle est dépassée», a déclaré à l'AFP Mohammad al-Sabri, le porte-parole de l'opposition. «Elle constitue l'acte de décès du régime politique dont les manifestants réclament la fin», a-t-il ajouté.

Dans son offre, le président a indiqué qu'il voulait charger le Parlement, le conseil consultatif et des personnalités d'élaborer la nouvelle loi fondamentale envisagée.

Il s'est également engagé à «continuer de protéger» les manifestants, qu'ils soient pour ou contre son régime.

M. Saleh a aussi promis une plus grande décentralisation dans un pays où les Sudistes réclament l'indépendance, voire l'autonomie, alors que des rebelles dans le Nord se plaignent de discrimination.

M. Saleh, dont le mandat s'achève en 2013, a anticipé dans son discours la réponse négative de l'opposition à son initiative.

La semaine dernière, il avait lui-même rejeté un plan de sortie de crise proposé par l'opposition prévoyant son départ avant la fin de l'année, et l'opposition avait appelé à intensifier la contestation populaire et à évincer le président.

Mercredi, Mark Toner, un porte-parole du département d'État américain a déclaré: «Nous restons profondément préoccupés devant la poursuite de la violence au Yémen, et nous continuons à appeler les forces de sécurité, tout comme les manifestants, à montrer de la retenue et à s'abstenir de violence».

Pour les États-Unis, qui apportent un soutien militaire important au Yémen, l'instabilité dans ce pays est une source d'inquiétude.

Le Yémen contrôle la rive septentrionale d'un des détroits les plus stratégiques du monde, celui de Bab el Mandeb, entre la péninsule arabique et la Corne de l'Afrique. Il a également une frontière de 1500 km avec l'Arabie Saoudite, qui redoute que son voisin ne devienne un havre pour les émules d'Oussama ben Laden, ennemi juré du pouvoir de Ryad.