Le Canada appuie sans réserve l'imposition de sanctions envers le régime libyen de Mouammar Kadhafi et soutient que Tripoli devra rendre des comptes pour les brutalités commises contre le peuple libyen, a déclaré vendredi soir le premier ministre Stephen Harper. M. Harper a fait ces commentaires après que le plan d'évacuation des ressortissants canadiens de la Libye, piloté par Ottawa, eut connu son lot de ratés pour la deuxième journée consécutive.

Le premier ministre appuie ainsi les mesures qu'envisage de prendre le Conseil de sécurité dans les prochaines heures, soit un embargo sur les armes, des sanctions individuelles contre des acteurs-clés du régime libyen, ainsi qu'un gel des actifs. Le Canada pourrait aussi imposer des sanctions supplémentaires.

En outre, le Canada demande que la Libye soit suspendue immédiatement du Conseil des droits de l'homme des Nations unies et que le Conseil de sécurité renvoie la situation en Libye à la Cour pénale internationale.

«La communauté internationale doit envoyer un message très clair: tuer des citoyens innocents, des citoyens de son propre pays, constitue une incroyable violation des droits de la personne et doit engendrer des conséquences sérieuses (...) Ceux qui sont responsables d'avoir ordonné et exécuté ces atrocités contre le peuple libyen doivent en être tenus responsables», a affirmé M. Harper.

La confusion règne

Sur un autre front, le Canada a de nouveau peiné à évacuer ses ressortissants de Libye, vendredi. Dès le début de la journée, le premier vol nolisé par Ottawa qui a réussi à se rendre dans le pays en crise est reparti bredouille. Parti jeudi en fin de journée d'Amman, en Jordanie, et arrivé à Tripoli avant l'aube vendredi, l'avion était toujours vide au moment d'atterrir à Rome, à son retour.

«Il n'y avait pas de Canadiens à l'aéroport et l'avion ne pouvait pas rester sur place, a expliqué Melissa Lantsman, directrice des communications du ministre des Affaires étrangères, Lawrence Cannon. Il n'y avait pas non plus de citoyens de pays alliés qui avaient besoin d'un vol.»

En matinée, le ministre de la Défense nationale, Peter MacKay, a parlé d'un problème de «coordination sur le terrain», en tentant d'expliquer pourquoi l'avion nolisé par le Canada était reparti vide. «Il faut s'assurer que les gens sont au courant qu'il y a possibilité d'être évacué», a dit M. MacKay, devant les journalistes à Ottawa.

Pourtant, Ottawa dépêchait en milieu de journée un deuxième appareil nolisé vers Tripoli, afin de poursuivre les efforts d'évacuation. Toutefois, au même moment, le site du ministère canadien des Affaires étrangères déconseillait fortement à ses ressortissants de tenter de se rendre à l'aéroport de la capitale libyenne, pour des raisons de sécurité.

«La route vers l'aéroport international de Tripoli est impraticable et la situation à l'aéroport est extrêmement chaotique; les Canadiens ne doivent pas essayer d'atteindre l'aéroport en ce moment», indiquait vendredi après-midi le Ministère.

Ottawa somme depuis 48 heures tous ses ressortissants de quitter la Libye par tous les moyens possibles, étant donné la détérioration de la situation sécuritaire.

Mais les efforts d'évacuation du gouvernement canadien se sont révélés quelque peu chaotiques, depuis l'annonce, mardi, de la mise en place d'un plan d'évacuation.

Jeudi, le premier vol nolisé par le gouvernement canadien avait dû être annulé pour des raisons de sécurité, la situation dans la capitale libyenne s'étant considérablement détériorée.

Ottawa avait aussi annoncé jeudi l'envoi d'un avion militaire C-17 en Libye pour évacuer les ressortissants canadiens, mais vendredi, en journée, l'appareil était toujours en attente à Malte.

Le cafouillage du Canada en Libye a d'ailleurs été remarqué à l'étranger, le quotidien New York Times y ayant consacré un article complet sur son site internet, vendredi. Le chef du Parti libéral, Michael Ignatieff, a soutenu que le gouvernement Harper est loin d'être à la hauteur depuis le début de la crise.

Il y aurait de 500 à 600 Canadiens en Libye, mais seulement 352 sont inscrits au registre des services consulaires. Mais déjà, 177 Canadiens ont été évacués, indique le ministère, grâce à des avions et bateaux de pays alliés, notamment l'Espagne, les États-Unis, et le Royaume-Uni.

«Nous collaborons avec nos alliés à l'égard de l'évacuation, a dit le premier ministre Stephen Harper, de passage à Val-d'Or, en journée vendredi. Quand les vols arrivent, nous prenons d'abord les Canadiens, mais s'il n'y a pas de Canadiens, nous prendrons les autres. Et les autres pays font la même chose et des Canadiens ont été évacués comme ça.»