Les opposants ne lâchent pas prise. De plus en plus de villes tombent aux mains des manifestants tandis que le pouvoir de Mouammar Kadhafi se concentre autour de la capitale, Tripoli. Le compte des morts, toujours incertain, laisse toutefois entrevoir des bilans affolants, bien au-delà des 300 morts officiels annoncés par le régime. Selon l'Italie, le pays européen le plus lié à la Libye, un millier de personnes auraient pu être tuées.

Le président américain, Barack Obama, qui s'est exprimé pour la première fois publiquement sur la situation hier, a qualifié la répression de «scandaleuse». Le soulèvement de la population libyenne, a dit le président, n'est pas téléguidé par les États-Unis. «Comme un Libyen m'a expliqué: nous voulons simplement vivre comme des êtres humains.»

Les États-Unis et l'Union européenne envisagent désormais des sanctions contre la Libye et le régime de Kadhafi. Une réunion du Conseil des droits de l'homme de l'ONU consacrée à la Libye se tiendra lundi à Genève, en Suisse.

Selon diverses sources, les opposants au régime ont consolidé leur emprise dans la partie est du pays. À Tobrouk, non loin de la frontière égyptienne, le commandant de l'armée libyenne dans la ville s'est joint aux manifestants. Kadhafi, a-t-il déclaré à la station de télévision Al Jazira, est un «tyran».

Les affrontements sont plus féroces près de Tripoli. À Musratha, à 200 km de la capitale, les manifestants ont déclaré avoir pris la ville, avant de se faire attaquer en soirée par des forces de sécurité loyales au régime de Kadhafi. «Les partisans du régime ont attaqué avec des mitrailleuses et des roquettes RPG les manifestants sans armes», a déclaré l'un d'eux au téléphone à l'AFP, en faisant état de «plusieurs martyrs».

Du côté ouest de Tripoli, des témoins ont annoncé la chute de Zouara (à 50 km de la frontière tunisienne). À Zaouia (à 50 km à l'ouest de Tripoli), un drapeau monarchiste, devenu symbole de l'opposition, aurait été hissé sur un bâtiment, à en croire les vidéos diffusées sur Facebook, dont l'authenticité n'a pas pu être établie. La même incertitude persistait hier au sujet de Sabratha (70 km à l'ouest de Tripoli), où les combats se poursuivraient.

Autres défections

Des vidéos difficiles à authentifier circulent sur l'internet, dont plusieurs montrent des cadavres de militaires qui auraient, selon les auteurs, refusé de tirer sur les manifestants.

Une chose est sûre, les militaires ne sont pas tous solidaires du régime. Deux pilotes de l'armée de l'air ont préféré s'éjecter en parachute et laisser leur appareil s'écraser plutôt que d'obéir à l'ordre qui leur intimait de bombarder Benghazi, selon le site de Quryna, un journal proche de Saïf al-Islam, l'un des fils de Kadhafi.

«Maintenant, Kadhafi utilise des mercenaires, pas parce qu'il le veut mais parce qu'il ne peut utiliser l'armée», a déclaré l'ancien chef du protocole Nour Al Masmari à Al-Jazira. «Il ne peut utiliser les forces armées libyennes parce qu'il s'agit de militaires fidèles et honnêtes. Ils ne peuvent se tuer eux-mêmes. Tuer leurs cousins, leurs oncles, leurs amis revient à se tuer soi-même. Il ne leur fait pas confiance.»