Face à l'escalade de la violence en Libye et les propos «provocants» et «inquiétants» du colonel Mouammar Kadhafi, qui refuse de quitter le pouvoir, le Canada emboîte le pas aux pays occidentaux et procédera à l'évacuation de ses ressortissants.

Si la veille Ottawa ne jugeait pas nécessaire de rapatrier ses citoyens, la dégradation rapide de la situation en Libye a changé la donne, a expliqué le ministre des Affaires étrangères, Lawrence Cannon, mardi en point de presse pour annoncer qu'Ottawa invitait maintenant ses ressortissants à quitter le pays d'Afrique du Nord.

Normalement, tant que les aéroports sont ouverts aux vols commerciaux, le gouvernement laisse le soin à ses ressortissants de quitter eux-mêmes le pays, mais pas cette fois-ci.

«Les propos qui ont été tenus aujourd'hui (mardi) par le colonel Kadhafi sont alarmants, sont inquiétants. Et donc, bien qu'il y ait encore des vols de type commercial qui sont disponibles, on a jugé qu'il était plus sage de procéder maintenant à faire les préparations requises pour que les Canadiens qui le souhaitent puissent quitter à la première occasion», a fait valoir M. Cannon.

Le ministère des Affaires étrangères prévoit qu'un premier vol devrait être en mesure de quitter Tripoli jeudi. Ottawa doit d'abord acquérir les droits d'atterrissage nécessaires puisque la Libye, pour l'instant, ne laisse pas les avions étrangers atterrir à Tripoli.

Comme ce fut le cas lors des soulèvements populaires en Égypte, dans les dernières semaines, le Canada collaborera avec ses alliés français, britannique, australien et néo-zélandais pour partager les avions et navires disponibles pour leurs ressortissants. Des Canadiens pourraient ainsi avoir l'occasion de quitter plus rapidement.

Les vols canadiens se dirigeront de nouveaux vers l'Europe, vraisemblablement à destination de Rome, et les Canadiens devront débourser entre 400 $ et 500 $ pour les frais de transport.

Le Canada compte 331 ressortissants enregistrés, mais ils pourraient être plus nombreux en sol libyen. Jusqu'à maintenant, 91 d'entre eux ont indiqué aux autorités canadiennes vouloir quitter le pays africain.

Dans un discours fort attendu d'un peu plus d'une heure, mardi, le colonel Kadhafi a juré de combattre le mouvement de contestation contre son régime - en place depuis plus de 40 ans - et de mourir en «martyr».

Loin de calmer le jeu, les commentaires du colonel ont suscité de plus en plus de protestation.

Les pays occidentaux, dont le Canada, ont vivement condamné les violences au pays, demandant l'arrêt immédiat de la répression sanglante.

«Nous nous attendons évidemment à ce que tout gouvernement prenne les préoccupations de ses citoyens au sérieux, mais pas qu'il s'engage dans des violences contre eux, qu'il ouvre le feu contre eux. Ceci est scandaleux et inacceptable, et le gouvernement du Canada et la communauté internationale vont continuer d'exprimer clairement leurs points de vue aux autorités de la Libye», a notamment souligné le premier ministre canadien, Stephen Harper.

Mais pas question, pour le moment, d'imposer des sanctions à la Libye.

«Les options, dans les jours à venir, vont probablement mieux se cristalliser. Mais pour l'instant, la priorité, c'est de s'assurer qu'on puisse sortir les Canadiens et les Canadiennes», s'est contenté de dire le ministre Cannon.

Le Conseil de sécurité des Nations unies, qui a tenu une réunion à huis clos sur la Libye, a à son tour réclamé la fin immédiate des violences, sans non plus engager de représailles.

La protestation s'est par ailleurs fait entendre au Canada, alors que des manifestations ont été organisées dans différentes villes au pays. Plusieurs dizaines de personnes se sont notamment rassemblées sur la colline parlementaire, à Ottawa, et une manifestation était prévue à Montréal en fin de journée.

Outre le Canada, plusieurs pays européens, la Turquie, la Serbie, la Bulgarie, l'Ukraine, l'Égypte et la Russie ont eux aussi annoncé qu'ils évacueraient leurs citoyens dans les jours à venir.

Les ressortissants canadiens voulant quitter la Libye peuvent appeler l'ambassade canadienne à Tripoli, au 218-21-335-1633, ou le centre d'opérations à Ottawa, au 613-996-8885.