Le soutien des États-Unis réclamé par la France pour son opération au Mali a commencé à se matérialiser avec les premiers vols de gros porteurs américains vers Bamako mais l'administration de Barack Obama prend garde de ne pas s'impliquer plus avant dans le conflit.

Onze jours après le début de l'opération Serval, le Pentagone a mis à disposition plusieurs avions C-17. A ce jour, l'US Air Force a effectué cinq vols pour le compte de l'armée française, transportant plus de 140 tonnes d'équipements et plus de 80 personnes, selon le porte-parole du Pentagone George Little.

Les rotations ont débuté lundi entre Istres (sud de la France) et Bamako, selon le porte-parole de l'état-major français, le colonel Thierry Burkhard.

«C'est vraiment un effort international, mené par les Français mais avec des pays venant en soutien, dont les Britanniques et les États-Unis», se félicite M. Little.

Dès le début de son intervention pour repousser la poussée des islamistes vers le sud du pays, Paris a présenté plusieurs requêtes à Washington afin de bénéficier d'un soutien logistique, en matière de renseignement et de ravitaillement en vol.

Outre les C-17, finalement mis à disposition à titre gracieux, les États-Unis fournissent également à Paris un soutien en matière de renseignements à l'aide de leurs satellites et vraisemblablement de drones.

En revanche, la requête concernant les avions-ravitailleurs est restée à ce stade lettre morte. Pour soutenir les missions de bombardement au Mali, la France mobilise une portion importante de sa flotte cacochyme de 14 avions-ravitailleurs.

L'Italie a accepté mardi d'en mettre un à disposition mais les seuls à disposer d'une réelle capacité dans ce domaine sont les Etats-Unis, avec leur flotte de 414 KC-135. En Libye en 2011, Washington avait assuré quelque 80% des opérations de ravitaillement en vol des appareils de la coalition.

«Nous allons continuer à travailler avec les Français pour déterminer quels sont leurs besoins à venir», plaide le porte-parole du Pentagone, qui se défend de «traîner les pieds».

Une menace pour les États-Unis?

Interrogé la semaine passée par l'AFP, des responsables américains de la défense avaient mis en avant des difficultés juridiques à résoudre avant de mettre à disposition les avions-ravitailleurs.

Mais le refus à ce stade d'accéder à la requête française semble en fait être d'ordre «politique», a confié un responsable militaire sous couvert d'anonymat. Sur le plan militaire, «nous sommes prêts, tout le monde est en place», assure-t-il.

Selon des médias américains, les réticences proviennent de la Maison Blanche qui s'interroge sur l'ampleur de la menace posée par l'islamisme radical.

«Quelle menace représente Aqmi pour le territoire des États-Unis? La réponse jusqu'à présent a été: aucune», a expliqué un responsable de l'administration Obama au Los Angeles Times.

L'administration Obama «se demande dans quoi on s'engage», confirme le responsable militaire à l'AFP.

Pour l'influent sénateur républicain John McCain, les États-Unis n'en font pas assez: «Si Aqmi est bien l'ennemi déclaré, alors nous devons faire tout ce que nous pouvons pour soutenir les Français», a-t-il déclaré, tout en soulignant que cela ne signifiait pas «envoyer des troupes au sol».

Mais Washington préfère appuyer l'engagement des pays de la Cedeao dans le conflit malien.

«Nous poussons tous les pays de la Cedeao depuis plus d'un mois maintenant pour voir ce qu'ils peuvent faire en termes de contingents disponibles», explique la porte-parole du département d'État Victoria Nuland, qui s'est félicité de l'annonce par le Tchad de l'envoi de 2000 soldats, rompus au combat en milieu désertique.

Washington a également envoyé ce week-end, selon elle, une centaine d'instructeurs militaires privés au Niger, au Nigeria, au Burkina Faso, au Sénégal et au Togo pour appuyer de futurs déploiements au Mali.