L'armée a lancé samedi l'assaut pour reprendre Tikrit et des combats avaient lieu aux abords de la ville, dans la plus grande offensive terrestre des forces gouvernementales depuis le début de l'avancée des insurgés sunnites le 9 juin.

Dans le même temps, des drones américains armés de missiles survolaient Bagdad pour «protéger» le cas échéant militaires et diplomates américains, selon un diplomate, même si le premier ministre Nouri al-Maliki s'est voulu rassurant, en affirmant que la capitale était «à l'abri» d'un assaut des insurgés.

Sur le plan humanitaire, des organisations internationales ont tiré la sonnette d'alarme sur les conséquences d'un conflit qui a déjà poussé 1,2 million d'Irakiens à fuir leur foyer depuis le début de l'année.

À 160 km au nord de Bagdad, des milliers de soldats, appuyés par l'armée de l'air, ont lancé samedi l'offensive sur Tikrit, ancien fief de Saddam Hussein, prise le 11 juin par des insurgés sunnites.

Les combattants, menés par les jihadistes de l'État islamique en Irak et au Levant (EIIL), se sont emparés depuis le début de leur offensive fulgurante d'importantes portions de territoires dans le nord et l'ouest de l'Irak.

«Une vaste opération militaire a commencé aujourd'hui pour chasser l'EIIL de Tikrit», a déclaré le général Sabah Fatlawi à l'AFP. Il a fait état de «centaines de blindés et de milliers de soldats avançant, ainsi qu'une équipe de démineurs sur la route depuis Dejla», localité située à 20 km au sud de Tikrit.

Des témoins ont pour leur part indiqué que les forces gouvernementales et les insurgés de l'EIIL s'affrontaient à Dejla, d'autres faisant état de l'arrivée de l'armée aux abords de Tikrit depuis l'ouest où de violents combats opposaient les deux camps.

Samedi soir, une source militaire a indiqué à l'AFP que les combats se poursuivaient à l'ouest de Tikrit.

Jeudi, l'armée avait repris l'université de Tikrit, sur la route menant vers Baïji (au nord). Selon le général Qassem Atta, conseiller de M. Maliki pour la sécurité, l'armée contrôle également désormais la route menant de Bagdad à Samarra, au sud de Tikrit, et mène des raids aériens sur les repaires des insurgés.

Plus au sud, des combats ont fait samedi 20 morts parmi les forces gouvernementales et 53 parmi les insurgés dans les provinces de Babylone et Al-Anbar, selon une source militaire.

Il y a une coordination avec les États-Unis «sur le terrain pour étudier les cibles importantes», a indiqué le général Atta, sans plus de détails.

Véritable dialogue national

L'Irak réclame depuis plusieurs semaines des frappes aériennes américaines contre les insurgés, mais les États-Unis se sont pour l'instant contentés d'envoyer 300 conseillers militaires et d'annoncer un plan de 500 millions de dollars pour armer et entraîner des rebelles modérés en Syrie voisine afin qu'ils participent à la lutte en Irak contre l'EIIL.

En Syrie, ce groupe s'est en effet attiré les foudres de la rébellion dans son ensemble en raison de ses exactions et de sa volonté d'hégémonie, et des combats entre ces anciens alliés ont fait des milliers de morts depuis janvier.

Samedi encore, des rebelles islamistes et la branche syrienne d'Al-Qaïda ont lancé une attaque contre l'EIIL pour chasser ce groupe de Boukamal, principale localité syrienne à la frontière avec l'Irak.

D'autre part, le porte-parole du ministère irakien de la Défense Mohamed al-Askari a annoncé samedi que l'Irak avait reçu de la Russie des avions de combat Soukhoi, selon la chaîne officielle Al-Iraqiya qui ne précise pas le nombre d'appareils livrés à Bagdad.

À Damas, le vice-ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Ryabkov, a souligné que Moscou ne resterait pas «les bras croisés» face à l'offensive des jihadistes, tout en insistant sur le fait qu'en Irak comme en Syrie, la solution ne pouvait venir que d'un «véritable dialogue national».

Partisan de la première heure d'une solution militaire et accusé d'avoir marginalisé la population sunnite, le premier ministre Maliki, un chiite, s'est rallié cette semaine à cette idée d'une solution politique, parallèlement à l'action de l'armée, cédant aux multiples appels internationaux en ce sens.

Le grand ayatollah Ali Al-Sistani, plus haute autorité religieuse chiite d'Irak, a lui aussi appelé à l'unité et à la mise en place d'un nouveau gouvernement.

Le Parlement issu des élections d'avril doit se réunir mardi pour déclencher la formation d'un gouvernement, mais ce processus, qui doit commencer par l'élection d'un président de la République, risque d'être long.

Les appels à l'unité ont de plus été tempérés vendredi par le président de la région autonome du Kurdistan Massoud Barzani, selon qui le contrôle exercé désormais par ses forces sur la ville disputée de Kirkouk, dans une zone riche en pétrole, ne saurait plus être remis en cause.