Amedy Coulibaly, l'auteur de la tuerie au supermarché cacher la semaine dernière, a acheté en Belgique les kalachnikovs et le lance-roquettes dont disposaient les frères Kouachi lors de la tuerie à Charlie Hebdo, affirment des médias belges, citant des sources policières. Des armes longtemps difficiles à obtenir, mais qui sont aujourd'hui accessibles et bon marché en Europe de l'Ouest, dit un expert.

C'est à deux pas de la Gare du Midi, à Bruxelles, qu'Amedy Coulibaly, auteur de la tuerie au supermarché cacher à Paris, vendredi dernier, aurait acheté ses armes ainsi que celles utilisées par les frères Kouachi dans l'attentat contre Charlie Hebdo, des attaques qui ont fait 17 morts dans la région parisienne.

Révélées par le quotidien bruxellois La Dernière Heure, ces informations semblent montrer à quel point il est facile pour un petit groupe d'individus de mettre la main sur des armes qui comptent parmi les plus prohibées en Europe.

Le fusil d'assaut Scorpion et le pistolet Tokarev utilisés par Amedy Coulibaly viendraient de Bruxelles et de la ville de Charleroi, au sud de la capitale. Les kalachnikovs et le lance-roquettes dont disposaient les frères Saïd et Chérif Kouachi dans les attaques contre les bureaux de Charlie Hebdo auraient été achetés dans le sud de Bruxelles «pour moins de 5000 euros» (7500 dollars canadiens), note le quotidien.

C'est un résidant de Charleroi, au sud de Bruxelles, qui s'est lui-même présenté à la police fédérale, mardi, en affirmant avoir vendu des armes à Coulibaly ces derniers mois, écrivait par ailleurs hier le quotidien La Libre Belgique.

«Ayant appris depuis les accointances de Coulibaly avec l'État islamique et les milieux djihadistes, l'homme, apeuré, aurait préféré en faire part aux forces de l'ordre», a précisé ce quotidien. L'homme a été placé sous mandat d'arrêt pour trafic d'armes par un juge d'instruction.

Le trafic d'armes foisonne dans les rues des quartiers du sud de Bruxelles, près de la gare belge de l'Eurostar, et les autorités ont jusqu'ici été incapables de l'endiguer, explique Christian Leuprecht, professeur agrégé de science politique dans le Collège militaire royal du Canada et à l'Université Queen's.

«Vous avez des armes de guerre qui sont offertes à des prix très bas, qui sont abondamment disponibles», dit M. Leuprecht en entrevue téléphonique.

«C'est l'instabilité au Maghreb, dans l'est de l'Ukraine, en Irak et en Syrie, qui contribue au flot d'armes», dit-il.

«Pour une poignée de dollars, des armes comme les kalachnikovs peuvent être achetées en Ukraine, et revendues pour plusieurs milliers d'euros en Belgique. Même si vous devez payer des gens pour transporter les armes - car ce ne sont jamais les vendeurs qui les transportent -, vous avez un profit énorme au bout du compte.»

Samedi, le site d'informations Médiapart révélait qu'en 2010, les auteurs des attaques terroristes de la semaine dernière avaient tenté une première fois d'acheter des armes en Belgique dans le but d'organiser l'évasion de leaders extrémistes emprisonnés en France. Les frères Kouachi auraient fait de la contrefaçon de vêtements et de chaussures de sport pour obtenir les fonds nécessaires, ont dit les autorités françaises.

Nouvelle réalité

Les trafiquants d'armes en Europe travaillent comme des trafiquants de drogue, explique Christian Leuprecht.

«Des passeurs sont payés pour conduire une voiture d'un point A à un point B. Ils ne savent pas ce qu'il y a dans le coffre. Souvent, des équipes les suivent en voiture, pour s'assurer qu'ils se rendent bien à destination.»

Une nouvelle réalité qui change le visage de la menace terroriste en Europe, et complique la tâche des services de renseignement.

«Avant, pour planifier une attaque à grande échelle, vous aviez besoin d'un réseau. Il fallait trouver des connexions pour les armes, trouver de l'argent, etc. Aujourd'hui, vous avez deux ou trois gars qui peuvent sans problème obtenir des armes de guerre, qui se financent eux-mêmes... Je ne serais pas surpris de voir ce type d'attaques devenir un plus grand problème en Europe dans les années à venir.»