Les hommages aux victimes des attentats de Bruxelles ont été perturbés dimanche par des manifestants nationalistes qui ont fait irruption sur la place transformée en mémorial dans la capitale belge, où les opérations antiterroristes se poursuivaient avec de nouvelles perquisitions.

La police antiémeute a fait usage de canons à eau pour disperser 200 manifestants vêtus de noir qui ont lancé «on est des hooligans», «on est chez nous», tout en répétant des slogans virulents à l'endroit du groupe djihadiste État islamique qui a revendiqué les attaques de mardi.

«État, complice de Daesh», ont encore dit certains nationalistes. Les manifestants ont également lancé des projectiles incendiaires vers les forces de l'ordre et dégradé du mobilier urbain, a précisé la police.

Le face-à-face s'est vite tendu avec les dizaines de personnes qui depuis mardi se relaient place de la Bourse, au coeur de Bruxelles, pour rendre hommage aux victimes, en silence ou en chansons.

Une dizaine de manifestants nationalistes ont été interpellés, selon la police, et le premier ministre belge Charles Michel a «condamné fermement ces dérapages». Une «marche contre la peur» prévue dimanche pourtant avait dû être annulée, les autorités estimant que la police devait en priorité s'occuper de la lutte antiterroriste.

Nouvelles opérations policières

Treize nouvelles perquisitions ont été menées dimanche à Bruxelles et dans le nord de la Belgique, et quatre personnes étaient en garde à vue, selon le parquet fédéral qui n'a toutefois pas précisé si ces opérations étaient liées aux attentats les plus meurtriers depuis 1945 dans le royaume.

Les enquêteurs tentent toujours de confirmer si le seul suspect inculpé en lien direct avec les attaques djihadistes de mardi, Fayçal Cheffou, est bien, comme ils le pensent, «l'homme au chapeau» qui a déposé une bombe à l'aéroport de Bruxelles-Zaventem aux côtés des deux kamikazes, Ibrahim El Bakraoui et Najim Laachraoui.

Ces deux hommes, comme le kamikaze du métro Khalid El Bakraoui, sont étroitement liés aux commandos des attentats parisiens de novembre.

Une arrestation en Italie et une nouvelle inculpation en Belgique sont venues illustrer encore une fois l'imbrication des réseaux djihadistes français et belges, qui a éclaté au grand jour avec les tueries qui ont fait 130 morts le 13 novembre à Paris et 28 mardi à Bruxelles, selon un bilan révisé.

Un Algérien de 40 ans, Djamal Eddine Ouali, a été arrêté samedi en Italie à la demande de la justice belge. Il est soupçonné, selon la police italienne, d'appartenir à un réseau de faussaires de documents liés aux djihadistes parisiens et bruxellois.

Parallèlement, un second suspect a été inculpé en Belgique dans l'enquête, distincte, sur un projet d'attentat déjoué jeudi en France, a annoncé dimanche le parquet fédéral belge. L'inculpation d'Abderamane A. pour «participation aux activités d'un groupe terroriste» s'ajoute, dans cette nouvelle affaire franco-belge, à celle de Rabah N.

À Bruxelles, l'agitation passée, des dizaines de personnes ont continué à se relayer place de la Bourse en ce dimanche de Pâques.

«Ne pas se cacher»

«Il faut se montrer, il ne faut pas se cacher», explique Mohamed Saïd Si Ahmed Haddi, un Belge de 50 ans d'origine algérienne. Pour Yves Susanne, imprimeur de 54 ans, «il faut montrer aux enfants qu'on n'a pas peur... même si on a peur».

Au fur et à mesure que le difficile travail d'identification des victimes progresse, le profil des personnes tuées s'esquisse. De jeunes Belges, comme l'étudiant en marketing Bart Migom, 21 ans, qui devait aller voir sa petite-amie aux États-Unis, et Léopold Hecht, 20 ans, dont la famille a fait don de ses organes dans l'espoir que cela «sauvera une vie».

Mais aussi, dans cette ville cosmopolite, capitale de l'Union européenne, des expatriés, à l'instar de l'Italienne Patricia Rizzo, 48 ans, qui travaillait dans une agence du Conseil européen de la recherche.

Il y a enfin des voyageurs de passage, dont Elita Weah, 41 ans, réfugiée libérienne qui avait acquis la nationalité de son pays d'adoption, les Pays-Bas, où elle était bénévole dans une maison de retraite, et se rendait aux funérailles de son beau-père aux États-Unis.

«C'est une souffrance qu'on ne peut pas décrire. Je la partage avec toutes les familles des victimes à Paris, Tunis et ailleurs», a confié le journaliste belge Michel Visart, qui a perdu sa fille Lauriane dans l'explosion du métro, à la télévision RTBF pour laquelle il travaille.