«Hier, on a regardé la télé jusqu'à 2h du matin, raconte Rajesh Chopra. On n'a pas très bien dormi »

Comme bien d'autres Indiens de Montréal, le restaurateur de la rue Jean-Talon, dans le quartier Parc-Extension, a passé plusieurs heures rivé à sa télévision, qui reçoit par satellite les nouvelles en continu en provenance de l'Inde.

Ce lien avec le pays d'origine a pris un trait tragique depuis mercredi. «Ils ont montré en direct un terroriste qui tirait sur la foule», raconte, les yeux écarquillés, M. Chopra, originaire du Panjab et installé à Montréal depuis 14 ans.

C'est cette violence qui donne une résonance particulière aux attentats de Bombay. La communauté indienne de Montréal est habituée d'apprendre aux nouvelles que des bombes explosent dans leur pays natal. Cette fois, l'horreur a un visage nouveau et déroutant. Au lieu d'attentats à la bombe anonymes, ce sont des jeunes hommes armés jusqu'aux dents, en mission suicidaire.

«C'est un très gros événement, dit M. Chopra. Ils sont très jeunes, les terroristes, 22 ou 23 ans. Je suis très surpris qu'ils agissent comme ça. Et le fait de viser des Américains ou des Britanniques, ça aussi, c'est nouveau.»

«C'est une attaque suicide, c'est ce qui est très choquant», dit Kishore Tandon, qui tient une boutique un peu plus à l'ouest, rue Jean-Talon.

M. Tandon est également secrétaire de l'Organisation Inde-Canada. Il souhaite que les événements de Bombay n'affectent pas les liens entre les communautés hindoues à Montréal. «Si ça se répète, les gens vont peut-être commencer à s'accuser entre eux. Il faut éviter cela.»

Tout comme M. Chopra, M. Tandon est de religion hindoue. Chez son voisin d'en face sur Jean-Talon, un club vidéo doublé d'un magasin de vêtements, on est musulman, mais tout aussi choqué par ce qui se passe à Bombay. «Chaque fois qu'il y a une attaque terroriste, je me dis: j'espère que ce n'est pas un musulman»,

dit Imtiaz Mastan.

Accoudé à son comptoir couverts de DVD, M. Mastan regarde les nouvelles en direct sur l'écran de son ordinateur. Originaire de l'État de Gujarat, au nord de Bombay, il tient commerce depuis 10 ans. «Je me sens mal pour toutes les victimes et aussi pour tous les étrangers qui aiment visiter l'Inde», dit-il. Sur un plan plus pratique, il craint de voir des marchandises qu'il a commandées bloquées dans le port de Bombay. «On attend des saris pour la fête de l'Aïd, le 9 décembre», dit-il.

Il se demande comment réagira Bombay, une ville qu'il aime et où il retourne régulièrement avec sa famille. «Ça devrait revenir à la normale, dit-il. Mais cette fois, ils ont frappé le cinéma, la gare, tous les endroits les plus fréquentés.»

Là-dessus M. Chopra est optimiste. «Les gens de Bombay ont la faculté d'oublier très vite les événements», dit-il.