Tourisme en berne, soldats armés devant les églises: Noël 2015 ne ressemble pas aux précédents à Paris, une capitale marquée par les pires attentats de son histoire et la menace de nouvelles attaques jihadistes.

Devant les grands magasins Galeries Lafayette et Printemps, aux vitrines animées spécialement pour les fêtes, les piétons circulent sous l'oeil de soldats armés et la foule est moins dense que d'habitude à cette époque.

«Après les attentats, les chiffres de fréquentation en décembre ne seront pas bons», reconnait-on aux Galeries Lafayette. «Les clients français ont logiquement manqué à l'appel, mais pas seulement. Certains étrangers comme les Japonais ont aussi été très sensibles au contexte».

La double série d'attentats jihadistes en janvier (17 morts) et en novembre (130 morts) a refroidi les envies de magasinage de fin d'année. Pour les achats, internet est largement gagnant, selon le secteur.

Côté tourisme, les réservations sont en forte baisse. Les professionnels espèrent qu'il ne s'agit que d'un «trou d'air» et comptent sur les mesures de sécurité pour ramener la clientèle dans la Ville lumière. La maire de Paris, Anne Hidalgo, a assuré voir une activité qui «redémarre sur le tourisme, sur la fréquentation des hôtels, sur la fréquentation des lieux, des magasins».

Il y aurait cependant 30% de Chinois en moins et une baisse de près de 80% pour les Japonais et les Américains, selon des professionnels du secteur. Sur la Seine, les fameux «bateaux mouches» qui font découvrir la ville accusent une baisse de fréquentation de 15 à 30%.

Églises surveillées

Pour les messes de Noël jeudi soir, la protection des églises a été renforcée, ont indiqué les autorités.

Une très forte menace subsiste en France, a récemment souligné le ministre de l'Intérieur, Bernard Cazeneuve, pour qui une action visant les églises aurait une «force symbolique».

La France compte quelque 45 000 églises catholiques, auxquelles s'ajoutent 4000 temples protestants et environ 150 lieux de culte orthodoxe.

Les évêques français ne s'attendent toutefois pas à moins de fidèles pour leurs célébrations. «Il y aura beaucoup de monde à Noël, peut-être plus cette année en raison de ce que nous vivons», les gens ont besoin de spiritualité», selon leur porte-parole, Olivier Ribadeau-Dumas.

À Strasbourg, pour les passants interrogés par l'AFP dans le quartier de la cathédrale, «quand on entend sonner les cloches, on pense à tous ceux qui ont disparu (dans les attentats). On ne peut pas oublier, même si on est en famille à partager des moments heureux», estime Frédérique Treffot 60 ans, une fonctionnaire accompagnée de deux amies.

Dans le quartier de la cathédrale, à quelques heures de la fermeture officielle du marché de Noël de Strasbourg, écourté d'une semaine à cause des attentats, on pouvait voir des policiers en patrouille se mêlant à la foule éparse des badauds et touristes.

«On est vigilants. On voit qu'il y a pas mal de force de l'ordre, c'est le signe d'une nécessité (...) On fait plus attention que l'année dernière, mais l'insouciance ne s'en est pas allée», explique Philippe Knor, touriste et médecin de 58 ans.

Aucun visiteur ne pourra assister debout à la messe de minuit: une fois les 1200 places assises occupées, l'accès à la cathédrale Notre-Dame de Strasbourg sera fermé.

La menace d'attaques au moment des fêtes de fin d'année ne se limite pas à la France. À Pékin, dans d'inhabituelles mises en garde à leurs ressortissants, les ambassades des États-Unis et de Grande-Bretagne leur ont demandé d'éviter le quartier animé de Sanlitun durant Noël, en raison de «possibles menaces contre les Occidentaux».

Aucune précision n'a pu être obtenue sur la nature des menaces invoquées. La sécurité a été fortement renforcée autour de l'ambassade américaine, avec plusieurs véhicules de police, ainsi que devant une vaste zone commerciale au coeur de Sanlitun, selon des témoins.

En Somalie, le gouvernement a interdit les célébrations de Noël et du Nouvel An dans le pays à majorité musulmane, expliquant qu'elles pourraient susciter des attaques des islamistes shebab.

«Tous les évènements liés aux célébrations des fêtes de Noël et du Nouvel An sont contraires à la culture islamique et pourraient nuire à la foi de la communauté musulmane», a expliqué à la presse Cheikh Mohamed Khayrow, directeur général du ministère des Affaires religieuses.