La Belgique doit décider dimanche si elle maintient l'alerte maximale à Bruxelles, devenue ville presque morte dans la crainte d'une réplique des attentats de Paris, avec des forces de l'ordre massivement déployées pour traquer les suspects.

Dimanche, outre les stations de métro toujours fermées, les places de marchés étaient vides, les musées et les salles de spectacles gardaient porte close.

Après une heure de service, seul un couple avait franchi la porte du «Roy d'Espagne», une brasserie médiévale très courue de la Grand-Place.

«On a annulé les commandes de croissants et de pains au chocolat», maugrée Patrick, un garçon de café.

«Un groupe de 140 personnes a appelé hier pour annuler un banquet. À ce rythme, le marché de Noël --qui doit s'ouvrir vendredi-- va aussi être annulé», s'inquiète-t-il.

Il y a «plusieurs suspects, c'est pourquoi nous avons mis en place une telle concentration de moyens», a justifié samedi le ministre belge de l'Intérieur, Jan Jambon face à cette décision sans précédent qui paralyse depuis samedi matin toute l'agglomération de Bruxelles, soit 19 communes.

Une nouvelle évaluation de la situation doit être faite dans l'après-midi et sera suivie par un Conseil national de sécurité, rassemblant les principaux ministres. Il s'agit de décider de rouvrir ou non lundi les lignes de métro, mais aussi écoles, magasins et sites culturels.

Le ministre belge de la Justice, Koen Geens, a laissé entendre que le métro serait à nouveau en circulation lundi «si tout se déroule normalement», sans donner plus d'informations sur d'éventuelles avancées de l'enquête.

La décision de fermer commerces et stations de métro a été prise samedi en raison d'un risque d'attentat «avec armes et explosifs» ciblant les rues commerçantes, les manifestations, les lieux animés et les transports dans la capitale belge.

Si les forces de l'ordre sont à la recherche de plusieurs suspects, elles traquent tout particulièrement Salah Abdeslam, un Français résidant en Belgique qui a joué au minimum un rôle de logisticien dans les attentats de Paris revendiqués par l'organisation État islamique (EI) et ayant fait 130 morts.

Neuf jours après, il reste introuvable. Son frère Brahim s'est en revanche fait exploser dans un restaurant parisien le 13 novembre.

Ce suspect, qualifié d'«ennemi public numéro un» par la presse belge, aurait été exfiltré vers la Belgique, selon deux hommes qui disent l'avoir aidé. Selon l'avocate de l'un d'entre eux, durant le trajet, Salah Abdeslam semblait «extrêmement énervé» et «peut-être prêt à se faire sauter».

Pour son frère aîné Mohamed, Salah a dû décider «de ne pas aller au bout de ce qu'il souhaitait faire». «C'est plus que mon espoir, c'est ma conviction», a-t-il affirmé dimanche lors d'une interview télévisée, où il a de nouveau appelé son frère à se rendre.

«Nous préférons voir Salah en prison plutôt que dans un cimetière», a-t-il insisté.

En Belgique, un troisième suspect arrêté a été inculpé vendredi pour terrorisme. Des armes ont été retrouvées à son domicile, mais pas d'explosifs.

Enfin, l'enquête se poursuit également en Turquie, où un Belge d'origine marocaine - Ahmad Dahmani, 26 ans - soupçonné d'avoir participé au repérage des cibles des attentats à Paris a aussi été arrêté.

Avion dérouté

Neuf jours après les attentats de Paris, la peur d'attentats terroristes reste extrêmement vive. Un avion de Turkish Airlines devant relier New York à Istanbul, avec 256 personnes à son bord, a été dérouté vers l'est du Canada en raison d'une alerte à la bombe.

Mardi, deux vols Air France avaient déjà été déroutés après leur décollage des États-Unis à la suite de menaces anonymes évoquant la présence d'une bombe à bord. Aucun explosif n'avait été trouvé.

Dans ce climat, le président américain Barack Obama a tenu à assurer de sa présence à la grande conférence sur le climat à Paris (COP 21), appelant les dirigeants de tous les pays à faire de même pour montrer que le monde n'a pas peur des «terroristes».

«En plus de pourchasser les terroristes, en plus de renseignements efficaces, en plus des frappes de missiles, en plus de tarir les sources de financement (...) l'outil le plus puissant dont nous disposons pour combattre» l'État islamique (EI) «est de dire que nous n'avons pas peur», a lancé le président Obama de Kuala Lumpur.

Sur le plan diplomatique, le président François Hollande est en campagne pour convaincre les grandes puissances de participer au combat de la France pour «détruire» l'EI.

Il recevra lundi à l'Élysée le premier ministre britannique, David Cameron, pour discuter de la lutte antiterroriste et de la Syrie, avant de s'entretenir avec Barack Obama mardi à Washington, Angela Merkel mercredi à Paris puis Vladimir Poutine jeudi à Moscou.

Le ministre français de la Défense, Jean-Yves Le Drian, a annoncé dimanche que le porte-avions français Charles de Gaulle, déployé en Méditerranée orientale, pourrait engager dès lundi ses chasseurs contre l'EI en Syrie.

Cette semaine, la France, traumatisée, va également rendre hommage à ses morts. Les premiers enterrements devraient avoir lieu lundi, avant un hommage national vendredi.