Fabien Clain, dont la voix a été identifiée sur une revendication des attentats de Paris par le groupe État islamique, est un vieux routier du djihadisme français, qui selon Le Monde avait déjà menacé le Bataclan en 2009.

Selon des informations obtenues par le quotidien français, il avait proféré des menaces contre la salle de spectacle parisienne en raison du présumé sionisme de ses propriétaires. Le terroriste est également connu pour être proche de Mohamed Merah qui, au nom du djihad, avait tué sept personnes dans le sud-ouest de la France en 2012.

L'intonation n'est ni martiale ni agressive, la voix est douce, posée. Les mots sont d'une violence rare pour se réjouir de la mort des «idolâtres» du Bataclan, la salle de concert visée par les attentats, qui ont aussi frappé des bars, des restaurants et un stade de soccer.

Et de menacer: cette attaque, qu'a fait 129 morts, «n'est que le début de la tempête et un avertissement pour ceux qui veulent méditer et retirer leurs leçons.»

Fabien Clain, 37 ans, n'appartient pas à la génération des «djihadistes Facebook» partis en Syrie après un embrigadement éclair par internet et dotés d'un bagage religieux sommaire.

Son profil et son passé en font un cadre et un mentor naturels pour les plus jeunes parmi les quelque 850 Français et Belges qui seraient actuellement en Syrie.

Converti à l'islam dans les années 1990, cet homme d'origine réunionnaise (île française de l'Océan indien) semble s'être radicalisé dans la première moitié des années 2000, comme son frère Jean-Michel, 35 ans. Il appartient alors à un groupe de jeunes salafistes radicaux qui fréquentent une salle de prières du quartier sensible du Mirail à Toulouse (sud-est).

«C'était quelqu'un qui était gentil, affable, souriant», se souvient pour l'AFP l'imam, Mamadou Daffé. Au milieu des années 2000, l'imam apprend toutefois qu'il est la cible de critiques des jeunes salafistes. Et en 2005, Clain cesse de venir «parce qu'il n'était pas d'accord avec le prêche», pense Mamadou Daffé.

Le groupe se retrouve volontiers dans un village au sud de Toulouse, Artigat, autour d'un «gourou», Olivier Corel. D'origine syrienne, l'«Émir blanc», aujourd'hui septuagénaire, fait office de «savant en religion» pour ces jeunes qui viennent régulièrement dans sa petite maison écouter ses préceptes.

«Haine contre les incroyants»

Au même titre qu'un autre converti, Thomas Barnouin, Fabien Clain, alias «frère Omar», exerce un ascendant intellectuel certain sur le groupe. Notamment auprès de deux frères, Abdelkader et Mohamed Merah, et d'un de leurs intimes, Sabri Essid.

Surveillé de plus en plus près, le groupe de Toulouse-Artigat apparaît dans les radars de la justice fin 2006. Le 12 décembre, Essid et Barnouin sont interceptés par l'armée syrienne, en route pour combattre les troupes américaines en Irak. Après quelques mois de détention, ils sont remis à la justice française.

Corel et Abdelkader Merah sont entendus sans être inquiétés mais Essid, Barnouin et Clain, présenté comme un «organisateur» de la filière djihadiste, sont condamnés. Le parquet fustige la «haine contre les incroyants» qui anime les membres de la filière.

Aussi Fabien Clain est-il en prison au moment de la campagne d'assassinats de Mohamed Merah, qui a abattu trois militaires ainsi qu'un professeur et trois enfants devant une école juive, à Toulouse et Montauban en mars 2012.

Mais les deux hommes ont correspondu par courrier durant les périodes de détention de Mohamed Merah dans des dossiers de droit commun, comme pendant les années de prison de Clain.

Il se désolidarisera publiquement des crimes du tueur au scooter et, à sa libération, quelques mois après, il ne s'installe pas à Toulouse, mais en Normandie.

Puis sa trace se retrouve en Syrie. Quand y est-il parti? Peut-être à la même période que le clan des Toulousains qui, de manière échelonnée durant le premier semestre 2014, trompent la surveillance des services français.

Cette année, le nom de Fabien Clain est apparu dans l'enquête sur le projet avorté d'attaque d'une église à Villejuif, en banlieue parisienne, en avril.

Samedi, c'est sa voix, selon les services, qui revendique au nom de l'EI le carnage parisien. Sur cet enregistrement, il glorifie les kamikazes, «soldats du califat» qui ont «pris pour cible la capitale des abominations et de la perversion». «Qu'Allah les accepte parmi les martyrs et nous permette de les rejoindre», ajoute la voix.



PHOTO AFP

Fabien Clain

-Avec Le Monde