L'accident de la mine San José et l'incroyable sauvetage des 33 mineurs a créé un précédent. Le Chili ne peut désormais rester les bras croisés face aux douteuses conditions de sécurité dans les mines de petite et moyenne importance. Le président Sebastian Piñera a promis des mesures correctives.

«Les conditions étaient vraiment très mauvaises, je pense que personne ne peut travailler comme ça», a dit Manuel Gonzalez, le premier secouriste à être descendu dans la nacelle pour faire remonter, un à un, les 33 mineurs. Il ajoute: «Je sais que, dans le Nord, beaucoup de mines fonctionnent de cette manière, mais c'est inhumain.»

La mine d'or et de cuivre de San José était connue dans la région pour être dangereuse. «Mon père nous disait souvent qu'il y aurait un accident», a dit Maritza Segovia, fille de Victor Segovia, dit l'écrivain de la mine parce qu'il a tenu un journal de bord durant les 69 jours de ce huis clos. «S'il continuait à y travailler, c'est parce qu'elle payait mieux qu'ailleurs.» Javier Castillo, le syndicaliste de la mine, a mené la lutte pour que les conditions soient améliorées. «On a présenté plusieurs rapports à l'inspection des mines, le Sernageomin, a-t-il souligné, mais il ne s'est jamais rien passé.»

«Le problème, au Chili, explique le député communiste de la région, Lautaro Carmona, c'est que les chefs d'entreprise préfèrent payer des amendes au lieu de mettre en place les mesures de sécurité adéquates, qui leur coûteraient beaucoup plus cher.» Qui plus est, le Sernageomin manque de moyens. «Il y a 2 inspecteurs pour 3000 mines», souligne la sénatrice socialiste Isabel Allende.

L'entreprise minière San Esteban, propriétaire de la mine San José, n'avait qu'une idée en tête: extraire. Au prix de la sécurité. «La mine était remplie d'eau, et l'eau, c'est un poison pour la mine, parce qu'elle facilite l'érosion et les éboulements, souligne Daniel Espinoza, mineur depuis 15 ans, entré à San José quelques mois seulement avant l'accident du 5 août.

La mine était notamment dépourvue de sortie de secours et de cheminée d'aération équipées d'échelles, autant de mesures qui auraient pu permettre aux mineurs de s'échapper.

«Plus jamais nous ne permettrons qu'on travaille dans des conditions aussi incertaines et inhumaines qu'à la mine San José et dans beaucoup d'autres lieux, a déclaré hier le président Sebastian Piñera au cours d'une conférence de presse. Nous générerons dans la culture et le coeur de notre pays le respect pour la vie, la sécurité, la dignité et la santé.»

Au mois de décembre dernier, alors en campagne électorale, le président avait promis de faire du Chili un pays développé. «Nous réviserons la loi, a-t-il ajouté. Nous allons changer beaucoup de méthodes et de critères. Nous allons adopter toutes les normes des pays développés.»

Si certains doutent que le président millionnaire, qui a fait sa fortune à la Bourse, se mettra à dos le monde de l'entreprise, Sebastian Piñera doit conserver l'image positive qu'il a gagnée avec le sauvetage. Or, la presse nationale, tout comme la presse internationale, suivra le dossier de près.