L'oncle, la tante et les cousins du tristement célèbre Aylan Kurdi, ce petit réfugié syrien retrouvé mort sur une plage de Turquie en septembre dernier, ont été accueillis comme réfugiés au Canada.

Mohammed Kurdi, son épouse Ghousun et leurs cinq enfants sont arrivés à Vancouver lundi. Ils sont parrainés par la soeur de M. Kurdi, Tima, qui était devenue la porte-parole de la famille en particulier - et du sort des migrants syriens en général.

Cette réunification vient clore une année douloureuse pour Mohammed et Tima Kurdi. Leur neveu de trois ans, Aylan, son petit frère de cinq ans et leur mère sont morts noyés en mer Égée en tentant de joindre la Grèce en provenance de Turquie.

La funeste photographie du cadavre d'Aylan, gisant face contre terre sur une plage turque, avait ému le monde entier et éveillé l'opinion publique sur le sort des migrants syriens chassés de leur pays par la guerre civile.

Le père du garçon, Abdullah Kurdi, avait alors expliqué que sa petite famille tentait de gagner le Canada pour rejoindre sa soeur Tima.

Une première demande de statut de réfugié de l'oncle Mohammed venait d'être rejetée par le gouvernement conservateur de l'époque, faute de documents appropriés, selon les autorités. Voyant cela, son frère Abdullah avait alors décidé de tenter sa chance en effectuant la périlleuse traversée de la mer Égée avec sa famille.

Après le décès tragique de sa femme et ses deux enfants, Abdullah Kurdi a décidé de renoncer à demander asile et il est retourné vivre au Moyen-Orient. Son frère Mohammed, lui, a persisté.

Deuxième demande acceptée

À son arrivée à l'aéroport de Vancouver, lundi, il a remercié - en arabe - les Canadiens et leur gouvernement pour lui avoir permis de réaliser son rêve. «Je suis content! Très content!», a-t-il lancé, en anglais cette fois.

Son fils Shergo, un des deux adolescents de la famille, a quant à lui indiqué qu'il avait bien hâte de retourner à l'école et d'amorcer sa nouvelle vie. La famille comprend aussi Haveen, 16 ans, Ranim, 10 ans, Rezan, huit ans, et Sherwan, cinq mois.

Après le premier refus essuyé par Mohammed Kurdi, un responsable au ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration avait invité Tima Kurdi à présenter une nouvelle demande pour son frère Mohammed et sa famille, à la mi-octobre, alors que le gouvernement n'exigeait plus certains documents difficiles à obtenir des Nations unies.

Mohammed Kurdi avait laissé sa famille derrière lui en Turquie il y a sept mois et se trouvait en Allemagne pour dénicher du travail. Il n'avait donc pas connu son petit dernier, Sherwan, né en juillet, jusqu'à la réunification récente de la famille à Francfort, avant leur venue au Canada.

Parmi ceux qui ont accueilli la famille à l'aéroport se trouvait Fin Donnelly, le député fédéral de Port Moody-Coquitlamm vers qui Tima Kurdi s'est tournée lorsqu'elle éprouvait des difficultés à faire venir sa famille.

Voir Mohammed Kurdi et sa famille arriver au Canada est «doux-amer», a-t-il dit.

«C'est toujours dommage qu'il faille une tragédie pour mobiliser la communauté internationale, mais dans ce cas-ci, c'est certainement ce qui est arrivé.»

Les Kurdi sont donc au nombre des 25 000 réfugiés syriens que le nouveau gouvernement libéral s'est engagé à accueillir d'ici la fin de février. Le ministre de l'Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté, John McCallum, admettait la semaine dernière que son gouvernement n'atteindrait sans doute pas son objectif d'accueillir 10 000 réfugiés syriens d'ici la fin de cette année.

Selon le site Internet du gouvernement, le Canada avait accueilli 2413 réfugiés syriens en date du 26 décembre.

Les Kurdi vont habiter pour l'instant chez tante Tima, qui compte embaucher son frère dans son tout nouveau salon de coiffure, à Port Coquitlam.

Un beau jour, Tima Kurdi espère que son frère Abdullah les rejoindra au Canada.

«Abdullah, nous tous ici aimerions que tu sois avec nous.»

«Mais tu es toujours ici», a-t-elle ajouté, une main sur le coeur.